Jeudi 3 octobre une fois de plus une embarcation de migrant-e-s a chaviré : il y avait 450 à 500 personnes à bord, 130 corps ont été retrouvés, 150 survivant-e-s et plus de 200 disparu-e-s. Les dirigeants italiens et de toute l’Europe s’indignent, même le pape s’y met, et les journaux font leur Une morbide exhibant les photos des cadavres repêchés qui s’entassent sur le port de Lampedusa. Une journée de deuil national est prévue pour aujourd’hui en Italie.
Mais depuis 1998, ce sont près de 20 000 migrant-e-s qui sont mort-e-s en mer méditerranée, leurs embarcations ayant chaviré ou ayant été coulées par des gardes côtes à coups de balles dans les pneumatiques ou de collisions. Tous les moyens sont bons pour le pouvoir afin d’empêcher des migrant-e-s de franchir les frontières. Récemment plusieurs pêcheurs ont été condamnés par des tribunaux italiens pour avoir porté secours à des migrant-e-s.
Aux déclarations de compassion “face à ce drame humain” s’ensuivent les annonces de nouvelles mesures pour renforcer encore plus la surveillance des frontières méditerranéennes de l’Europe. Depuis des années se multiplient patrouilles de flics et de militaires conjointes entre les pays européens et africains, et outils de surveillance technologique ultra-sophistiqués : radars, caméras thermiques, et plus récemment des drones. Le tout rendant toujours plus difficile et dangereux le passage. Le 7 octobre prochain, une réunion européenne est prévue au Luxembourg afin de renforcer le système eurosur destiné à la collaboration en matière de lutte contre l’immigration clandestine entre les États membres de l’UE et avec l’agence de surveillance des frontières Frontex : partage de données (par exemple les empreintes) et d’informations en temps réel entre diverses autorités et outils de surveillance, tels que les satellites ou les systèmes de comptes rendus des navires, par le biais d’un réseau de communication protégé. Mardi dernier à Tripoli en Libye (là d’où est parti le bateau) les chefs d’état-major des armées libyenne et italienne se sont entretenus dans le cadre des accords de coopération entre les deux pays, sur les moyens de renforcer leurs relations militaires, notamment en matière de lutte contre l’immigration et de protection des frontières.
On a appris il y a quelques heures qu’un supposé passeur aurait été arrêté parmi les survivants. Pour légitimer un peu plus leur discours les dirigeants aidés de leurs amis journalistes, mettent l’accent sur “les mafias de passeurs” et “les réseaux terroristes” qui favorisent l’immigration clandestine et les trafics de drogue. Le mec arrêté serait un tunisien, enregistré à Lampedusa il y a quelques mois et qui venait de se faire expulser.
Ceux qui parlent à l’heure actuelle d’un drame humain et prétendent agir sont les mêmes qui tuent en renforçant toujours plus le contrôle et la répression aux frontières de l’Europe.
Il faut en finir avec les frontières et les États, pour la liberté !
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[Lu sur sanspapiersnifrontieres, le 4 octobre 2013]