Pour que le système qu’on nous impose puisse se maintenir, il lui faut mettre en oeuvre toutes sortes de restructurations. Il y a bien sûr les fameuses restructurations des entreprises et les mesures d’austérité du gouvernement, mais il y a aussi une augmentation généralisée de la répression dans le plus de domaines de la vie possibles. Lorsque la préservation de ce système rend de plus en plus difficile pour beaucoup de gens le simple fait de mener une vie digne, l’Etat doit en effet étendre sa palette de moyens pour tenir tous ces gens en laisse, renforcer l’oppression, nicher sa toute-puissance apparente dans les têtes.
Et ces moyens, il y en a de toutes sortes. Ce sont les temples prestigieux de la répression, dont on annonce l’ouverture au son du tambour comme un grand service rendu par l’Etat à la société, mais qui en fin de compte doit surtout incarner la rigidité du pouvoir. Ce sont en même temps toutes ces petites mesures qui pénètrent subrepticement le quotidien et dont on ne comprend que plus tard qu’elles ont tout changé. C’est la nouvelle maxi-prison qu’ils veulent bientôt ériger à Haren, le nouveau centre commercial à la périphérie de ton quartier, le nouveau commissariat à quelques minutes de chez toi ou la nouvelle caméra au coin de ta rue. Ce sont les nouveaux portiques qui veulent t’obliger à payer le métro, ce sont les projets de réaménagement et de construction visant à nettoyer le quartier des pauvres, c’est la chasse toujours plus intense aux chômeurs qui pousse tant de gens dans la misère, c’est la multiplication du nombre d’uniformes dans la rue, revêtus par ceux qui ont promis de fliquer les autres en échange d’un salaire fixe.Passer à une vitesse toujours plus élevée est un mouvement intrinsèque du capitalisme, et le rôle qu’on nous y réserve devient aussi toujours plus clair : courir avec lui ou rester en arrière, se laisser intégrer ou se laisser enfermer. A Bruxelles, cette pression est délibérément augmentée pour bannir une fois pour toutes de ses rues les éléments que les autorités arrivent difficilement à contrôler. Dans cette guerre contre la rébellion, contre l’indocilité, contre la sédition face à l’ordre établi, mais aussi tout simplement contre les pauvres, la nouvelle maxi-prison à Haren est un grand symbole. Mais le terrain que l’Etat conquiert dans cette guerre s’étend jusqu’au jardin de chacun. Si on ne veut pas s’apercevoir dans quelques temps de n’être devenus que de simples marionnettes du système, c’est bien là qu’il faudra mener un combat sans compromis pour notre liberté.
Les tentacules de la prison à ciel ouvert commencent à ta porte, les possibilités de sabotage et d’attaque également…
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[Publié dans Ricochets n° 5, avril 2015]