[Mauvaises Intentions] Fin du procès antiterroriste de mai 2012

Le délibéré du procès antiterroriste pour six camarades a été rendu le 25 juin.

Le délai pour faire appel étant dépassé, il est confirmé que ni le parquet ni les inculpés ne font appel des condamnations. Les camarades inculpés dans cette affaire ont décidé de ne pas faire appel. Parce qu’un camarade a été relaxé. Mais aussi parce que faire appel engagerait les inculpés dans un processus long et coûteux en temps, en argent et en énergie. Se lancer dans un appel nécessiterait d’aller jusqu’au bout du processus judiciaire, c’est à dire éventuellement jusqu’aux instances européennes, ce qui signifie plusieurs années de procédure pour une histoire qui a déjà duré quatre ans ; et tout cela pour un résultat incertain.

La copie du jugement est toujours en attente, des extraits seront publiés dès que possible.

Pour un rappel plus détaillé de l’affaire : http://infokiosques.net/mauvaises_intentions

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[Publié sur Indymedia Paris le 16 juillet 2012]

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[Mauvaises Intentions] PARIS : Rendu du procès antiterroriste de mai 2012

Voici le rendu du procès contre 6 camarades qui s’est tenu en mai 2012, prononcé le lundi 25 juin à 13h30.

Pour un rappel plus détaillé de l’affaire voir http://infokiosques.net/mauvaises_intentions

• Frank : non-coupable, relaxé de tous les chefs d’inculpation, il peut demander réparation pour les 6 mois de détention préventive déjà effectués

• Ivan : relaxé pour le refus ADN, coupable des autres faits reprochés, condamné à 1 an de prison dont 6 mois avec sursis, rejet de la demande de non inscription au casier judiciaire

• Bruno : relaxé pour le refus ADN, coupable des autres faits reprochés, condamné à 1 an de prison dont 6 mois avec sursis

• Damien : relaxé pour le refus ADN, coupable des autres faits reprochés, condamné à 2 ans de prison dont 1 an avec sursis

• Inès : coupable de l’ensemble des faits reprochés, condamné à 30 mois d’emprisonnement dont 18 mois avec sursis, rejet de la demande de non inscription au casier judiciaire

• Javier : coupable de l’ensemble des faits reprochés, condamné à 3 ans d’emprisonnement dont 2 ans avec sursis, rejet de la demande de non inscription au casier judiciaire

De plus, l’ensemble des scellés est confisqué.

A noter que la détention préventive déjà effectuée couvre la quasi totalité des peines de prison fermes, il y a donc peu de probabilités que l’un des inculpés retourne en prison. Ceux pour qui il reste quelques semaines ou mois à faire seront convoqués ultérieurement devant un juge d’application des peines.

A noter aussi que le caractère terroriste de l’affaire a donc été maintenu.

Les condamnations sont soit identiques aux réquisitions du procureur, soit légèrement allégées (Inès, Javier), sauf bien sûr pour Frank qui est relaxé.

Le parquet comme les inculpés ont maintenant 10 jours pour faire appel.

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[Diffusé sur Indymedia Paris le 25 juin 2012]

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« Affaire de Chambéry » : Rendu du procès

Comme prévu, le rendu est tombé ce Vendredi 15 juin. Ça méritait bien une brève plutôt qu’un complément d’info.

Pour Mike, donc : un an, dont six mois avec sursis (pour rappel le proc avait demandé un an ferme). Vu les deux-trois mois déjà passés en détention préventive, il y a des chances que le passage par la case prison ne soit pas nécessaire (jours-amende, bracelet…). On tiendra au courant.

Pour les autres : quatre mois de prison avec sursis (le proc’ demandait six mois avec sursis, et 5000 euros d’amende chacun).

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[Lu sur Indymedia Grenoble le 17 juin 2012]

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[Marseille 20 juin 2012] Outrage et Rebellion : un joker pour nous faire taire !

A l’appel d’un rassemblement de soutien à un sans-papier menacé d’expulsion, une quarantaine de personne se réunissent le vendredi 4 novembre 2011 devant le centre de rétention du Canet. Assez rapidement la police disperse les manifestants qui tentent de se faire entendre des retenus. Dans la confusion, une personne se retrouve aux mains de la police. Elle comparait le 20 juin à 8H30 pour « Outrage et Rébellion ».

Depuis 20 ans, les poursuites pour « outrage et rébellion » ne cessent d’augmenter. Bien sûr, pour les flics, multiplier les plaintes pour « outrage et rébellion » est un bon moyen d’arrondir les fins de mois. Mais au delà de ces « petits arrangements », le délit d’ « Outrage et rébellion », est devenu une menace permanente que les flics peuvent sortir de leur poche à n’importe quel moment, et qui sert d’outil idéal d’intimidation et de répression.
« Outrage et rébellion », c’est un bon prétexte pour justifier à posteriori l’arrestation de qui ils veulent, quand ils veulent, et les gardes à vues qui vont avec.
« Outrage et rébellion », c’est une bonne combine pour camoufler les interpellations musclées et l’usage de la violence.
« Outrage et rébellion », c’est une façon de nous menacer pour nous empêcher d’intervenir quand quelqu’un se fait contrôler, arrêter ou tabasser devant nous.

En matière de répression des pauvres, le délit d’ « Outrage et rébellion » ne profite pas qu’à la police : le dépôt de plainte pour « Outrage et rébellion » se généralise aussi chez les agents des CAF et des pôles emplois et chez les contrôleurs assermentés en tout genre, afin de calmer les ardeurs des pauvres qu’ils traquent de plus en plus.

« Outrage et rébellion » c’est en définitive un moyen facile pour nous mettre la pression, nous faire taire, nous empêcher de réagir, casser les solidarités possibles et les dynamiques de lutte face à l’exploitation, l’enfermement, les expulsions…

Ce fut le cas lors du rassemblement du 4 novembre 2011, l’arrestation d’une personne sous prétexte d’ « outrage et rébellion » permit une dispersion rapide et abrega la communication avec l’intérieur.

Dans un contexte où la gestion des migrations en Europe est de plus en plus répressive et où la colère gronde souvent dans les centres de rétentions, les gouvernements ont tout intérêt à empêcher que ces révoltes ne fassent tâche d’huile. C’est pourquoi dès que des solidarités se manifestent entre les retenus et ceux à l’extérieur, l’Etat réprime. Et pour réprimer facilement, quoi de plus simple que de casser toute tentative de rassemblement devant les centres de rétention en arrêtant les manifestants qui y participent. Lors du rassemblement du 4 novembre 2011, l’arrestation d’une personne sous prétexte d’ « outrage et rébellion » permit une rapide dispersion et empêcha toute communication avec
l’intérieur.

Plutôt que de rester isolés face à la police, aux tribunaux et au monde carcéral, nous pensons que nous avons intérêt à nous soutenir mutuellement, en venant nombreux aux procès des uns et des autres, en s’entraidant juridiquement pour préparer nos défenses, en mettant en place des caisses de solidarité afin de payer les frais d’avocats et les
mandats.
Kaliméro sous le soleil est l’une de ces caisse de soutien. C’est aussi un collectif de solidarité face aux offensives du système pénal et judiciaire qui se propose de faire circuler des informations sur les procédures et incarcérations en cours, d’organiser des rassemblements devant les tribunaux… en plus de l’envoi de mandats mensuels aux prisonniers ou de la prise en charge des frais de défense lorsque le besoin s’en fait
sentir.
Face à la répression, la solidarité est notre arme. Pour ne pas les laissez nous isoler ni nous foutre la pression, rassemblons nous le 20 juin à 8H30 devant le Tribunal de Marseille (6 rue Joseph Autran 13001 Marseille) contre le délit d’« Outrage et Rébellion ».

kalimerosouslesoleil [a] no-log.org

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[« Affaire de Chambery »] Aux journaliste$ (à certain.e.s plus que d’autres…)

[Texte destiné aux journalistes diffusé le jour du procès]

La raison de ces quelques lignes est simple, ne pas gaspiller notre énergie et notre salive. Suite à cet accident, journalistes en tout genre vinrent grapiller du spectacle à se mettre sous la dent, du pain béni pour vous qui avez sans cesse besoin de faits divers sensationnels afin de gagner votre salaire. Seulement, ce fait divers couta la vie d’une proche et l’incarcération de plusieurs de ses amis. Non, votre spectacle n’était pas le notre, vous nous avez pourris, vous avec divulgués nos identité contre notre gré, vous vous êtes introduits dans notre vie privée et avez dévoilé notre passé sans se soucier des conséquences pour notre vie actuelle, vous avez salis la mémoire de notre amie décédée et vous nous avez qualifié de terroristes et autres qualificatifs pouvant nuire à notre sociabilité avec comme source des simples soupçons policiers. Vous avez diffusez des faux pronostics médicaux concernant la personnes blessée sans vous soucier des conséquences engendrées sur les proches déjà privés d’informations à cause du dispositif policier. Vous vous êtes servi de cet événement pour renforcer une fois de plus le discours sécuritaire de l’état et avez participé activement à la construction d’un monde avec plus d’effectifs sécuritaires et de moins en moins de liberté. Vous avez fait votre travail me direz vous… Nous ne pouvons que constater que le procès de nurenmberg aura au moins la vocation de servir de jurisprudence pour toutes les crevures de votre espèces. Nous vous haissons, non seulement pour des motifs personnels qui sont nombreux mais aussi pour votre rôle dans la conservation de ce monde de merde. Pas une semaine ne passe sans qu’un avis de recherche ne fleurisse dans vos torchons, sans que vous ne diffusiez le numéros d’une gendarmerie et incitez les témoins à la délation, sans que des syndicats de matons ne se lamentent sur leurs conditions de travail et ne demandent plus d’effectifs parce que quand même, des prisonniers se suscident et même que des fois ils refusent de réintégrer leurs cellules. Vos articles sont de simples compte rendus policier et il est difficile de croire en une quelconque objectivité lorsque vous avez choisis une seule et unique source d’information et êtes prêt à tout pour défendre ce système social allienant et oppressif. Vous n’êtes pas des victimes de la situation, vous avez choisis votre camps et ce n’est pas le notre. Nous sommes contre vos idéaux libéraux, contre votre monde marchand ou tout se vend et tout s’exploite, nous sommes contre les prisons que vous vantez sans cesse (et autres aménagements de chatiments) ainsi que la société qui les construit dont vous vous faite les portes paroles, nous sommes contre le sexisme qui orne vos torchons et nos vies, nous sommes contre le spécisme et toutes autres formes d’autoritarismes et de dominations que vous propagez de par votre position sociale, nous sommes contre vous et nous vous haissons. Vous avez fait votre travail me direz vous, nous le savons et c’est bien pour cela que nous sommes ennemis…

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[« Affaire de Chambery »] Plaidoirie de Mike

Plaidoirie de Mike TGI de Chambéry, le 25 mai 2012

Les quelques mots que je vais prononcer n’auront pas la vocation de me défendre mais celle de placer cette journée passée dans un tribunal et le rôle de la justice dans le contexte social actuel. Je ne reviendrai pas sur les faits m’étant reprochés pour plusieurs raisons. Contrairement à vous, magistrats en tout genre, ces faits m’ont touché au plus profond de ma chair et de mon coeur, si vous pensez avoir quelque chose à rajouter à ma peine, cela se fera sans ma collaboration et sans que vous exerciez un rapport de force physique sur ma personne, ne vous attendez pas à ce que je ne me chatie plus que ce que je ne l’ai déjà fait, pour moi, l’heure est à ma reconstruction et non à ma soumission à votre système hétérocapitalofasciste. De quel droit pensez vous pouvoir me juger, quel pretexte vous donnerait une supériorité quelconque sur qui que ce soit ? Si vous prétendez défendre une morale, sachez que votre morale n’est pas mienne et que tout vos actes me font vomir. La société que vous défendez ne me correspond pas, non parce que je suis né du coté des opprimés mais parce que je ne veux pas faire partie des oppresseurs. Je suis un homme, blanc, issu de classe moyenne relativement aisée avec une éducation chrétienne et ne me sens par conséquent pas attaqué de par mes origines dans mon quotidien. Personne ne pourra nier que cette affaire aurait été traitée de manière bien pire encore par votre institution si mon origine religieuse était issue de l’islam, si mon origine ethnique ne se trouvait pas dans un pays occidental et si j’avais vécu mes années d’enfance dans la précarité. Si ce ne sont pas des motifs sociocuturels qui m’ont ammené devant vous peut-être que ce sont mes pratiques et votre manque de contrôle sur mon existance qui vous ont poussés à prendre le premier prétexte pour user de vos pouvoirs répressifs et tenter de m’enfermer dans vos normes alliénantes et oppressives. Dans ce dossier, la question de la violence fut souvent abordée. On m’a systématiquement questionné sur la violence de mes actes et de mes intentions, mais jamais on ne m’a questionné sur ce que resprésente la violence à mes yeux. Or la violence est un concept et donc n’a pas de définition universelle, ce qui paraît violent pour quelqu’un ne le sera pas forcément pour d’autre. Si on me demande aujourd’hui si je suis violent, la réponse est oui, de la même manière que si l’on me demande si je vous considère comme des individus violent je répondrai également par l’affirmative. Dans une réalité sociale telle que nous la vivons actuellement, personne ne peut selon moi avoir la prétention de se déclarer non-violent. Tout les actes les plus anodins de notre quotidien sont violents. Manger une banane profite à des multinationales ayant des politiques sociales extrêmement nuisibles et exploitent sans scrupules les ressources naturelles et les ouvriers, c’est un acte violent. Payer ses impôts et ainsi financer des opérations millitaires en irak ou en afganistan, envoyer des stock de matériel pour aider le gouvernement tunisien à maintenir son régime dictatorial, financer les recherches bio-nano-technologiques pour arriver à contrôler de plus en plus les populations. Oui, payer ses impôts est un acte violent. La liste des actes violents dans notre quotidien est longue et ne sera jamais exaustive. Il me parraît donc plus intéressant d’observer à qui profite cette violence. A-t-on vu beaucoup de précaires, de marginaux, d’immigrés fuyant la merde qu’a fait l’occident dans leurs pays profiter de cette violence ? Non. A-t-on déjà pris en compte la violence des concepts urbanistiques réalisés par le corbusier et autres de vos sbires dans les révoltes des banlieues. Au contraire, elles sont systématiquement criminalisées. Quelle est la violence d’une voiture brûlée lorsque cet acte est la suite d’années de mise à l’écart et d’oppressions sociales. Parle-t-on de la violence du système carcéral qui est telle qu’environ 120 personnes par années préfèrent la mort que d’être enterré vivant ? Non, là encore vous criminalisez les mouvements de prisonniers.ères et élaborez sans cesse de nouvelles stratégies, de nouvelles architectures, de nouveaux aménagements de peines afin de diviser et écraser encore plus violemment les personnes confrontées aux réalités carcérales. Magistrats, si vous me considerez comme un individu violent, sachez que je vous envoie la réciproque. La différence entre nous est que vous cherchez à maintenir cette violence pour garder vos avantages sociaux alors que je cherche à m’en affranchir afin que chaque individu puisse s’émanciper et devenir libre. Si vous haissez mon rapport à la violence sachez que je hais les votres et ne m’insérerai pas dans vos normes sociales engendrant autoritarisme et domination. Non, je ne suis pas insérable dans votre monde où tout est affaire d’argent et où la société est séparée en classes sociales. Je ne veux et ne peux en aucun cas passer le tiers de mon temps à offrir ma sueur à un patron au nom de la croissance de l’économie occidentale. Non, je ne suis pas insérable dans votre monde de misère affective et refuse de limiter mes liens sociaux à une relation amoureuse sur le modèle judéo-chrétien et préfère chercher mon épanouissement hors des limites de votre morale sexiste, où tout est divisé de manière binaire en fonction de son genre biologique et tout entretient votre monde patriarcal. Non, je ne suis pas insérable dans votre monde raciste, où l’économie mondiale est issue directement du modèle colonialiste et où toutes les ressources nécessaires au confort occidental ainsi qu’au maintient de son rapport de force sur le reste de la planète proviennent du vol de matières premières dans des pays occupés par des entreprises occidentales et engendre des désastres tant au niveau écologique que social. Non, je ne suis pas insérable dans votre monde déstructeur, où l’être humain exploite et détruit son environnement, où au nom du luxe et du progrès on décime des espèces animales et végétales, où au nom du confort et de l’industrie le nucléaire devient si important pour vos besoins énergétiques et votre soif de pouvoir que vous l’imposez à la terre entière, où au nom de la science vous imposez les ogm, les monocultures et l’agriculture chimique en prétendant que cela est la seule solution possible à la survie de l’espèce humaine. Non je ne suis pas insérable dans votre monde où l’être humain est considéré comme supérieur à toutes les autres espèces animales et végétales et ne veux pas participer au maintient d’une société où les bases de nos matières premières et de notre alimentation sont directement issues de l’exploitation animale. Votre morale est celle du capital, celle de la conservation de cette société patriarcale séparée en classes sociales, où tout se vend et tout s’exploite. Nous n’avons pas les mêmes intérêts…

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[Mauvaises Intentions] Compte-rendu des derniers jours du procès antiterroriste

Petit rappel des faits : Ivan, Bruno et Damien sont arrêtés en janvier 2008 alors qu’ils se rendent à une manif devant le centre de rétention de Vincennes avec des fumigènes artisanaux et des crève pneus, qui deviennent pour la justice et les médias une “bombe à clous”. Ivan et Bruno sont alors placés en détention préventive et Damien sous contrôle judiciaire. Quelques jours plus tard, Inès (*Isa) et Franck (*Farid) sont arrêtés lors d’un contrôle des douanes à Vierzon en possession de manuels expliquant des techniques de sabotage, du plan d’une prison pour mineurs et de chlorate. L’antiterrorisme se saisit de l’affaire. Les flics prétendent que l’ADN d’Isa correspondrait à une des 5 traces ADN présentes dans un sac contenant des bouteilles d’essence, retrouvé sous une dépanneuse de flics pendant l’entre-deux tours des présidentielles de 2007. Rapidement, ces deux enquêtes sont jointes en un seul dossier, instruit par les mêmes juges antiterroristes. La police ratisse alors dans l’entourage des personnes arrêtées et des personnes fichées “Anarcho-Autonomes” pour tenter de trouver qui se cacherait derrière les ADN manquants. Javier (*Juan), le frère d’Inès (*Isa), puis Damien (qui avait été arrêté avec Ivan et Bruno) sont mis en prison pendant plusieurs mois car leurs profils ADN correspondraient aussi aux traces retrouvées sous la dépanneuse. Par ailleurs, en juin 2010, Javier (*Juan) a, en plus, été mis en examen pour une série de sabotages par incendie sur des armoires électriques de signalisation SNCF qui ont paralysé une partie du trafic ferroviaire en 2006 pendant le mouvement « CPE ». Son ADN aurait été retrouvé sur le lieu d’une tentative de sabotage. Inès (*Isa), Javier (*Juan), Damien, Ivan, Franck (*Farid) et Bruno ont chacun fait entre 5 et 13 mois de détention préventive dans le cadre de cette procédure. Et ils restent sous contrôle judiciaire.

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• 4eme jour de procès, le lundi 21 mai 2012 à la 10ème chambre du TGI de paris

L’audience correctionnelle s’ouvre par une question de la juge Simon. Six personnes comparaissent : Ivan, Bruno, Inès, Frank, Damien et Javier. La chambre est composée d’une juge et de ses deux assesseurs, ainsi que d’un procureur, d’un huissier et d’un greffier.

Est ce que les prévenus veulent ajouter quelque chose ?

Frank donne à la juge et au procureur différentes pièces :
-  La lettre qu’il a écrit en prison à Meaux- Chauconin « VUES DU DELIRE ANTI-TERRORISTE » que la juge lit en entier. Cette lettre, qui n’était pas dans le dossier de l’instruction, décrit sa garde à vue antiterroriste, la perquisition et sa détention.
-  Un communiqué du NPA pour la libération de Jean-Marc Rouillan du 20 avril 2012 et un communiqué pour une « journée internationale d’action pour Georges Ibrahim Abdallah » de la Fédération des jeunes communistes du Pas de Calais. C’était pour faire un retour sur les autocollants retrouvés par la police sur son frigo dont un demandait la libération de Rouillan et l’autre la libération de Georges Ibrahim Abdallah. Le tout pour montrer que ces deux hommes ont le soutien de plusieurs organisations et qu’être solidaire d’eux ne signifie pas appartenir à cette Mouvance Anarcho-Autonome Francilienne (MAAF) créée par la police. Il dit que l’instruction essaye de créer un imaginaire violent à la MAAF, et qu’elle va jusqu’à mettre en avant des autocollants trouvés sur mon frigo.

Damien dit à la juge que lorsqu’elle pose des questions sur les manifestations ou les gardes à vue qu’il a pu faire avant l’instruction, elle essaye de créer la mouvance, alors que ces actions et les sites qui les diffusent sont publics. Elles peuvent donc être réappropriées par tout un chacun. Les arrestations des 6 prévenus sont à remettre dans un contexte plus large : lutte Anti-CPE, lutte contre les centres de rétention, les manifestations contre l’élection de Sarkozy en 2007, où des milliers de gens ont participé. Il ajoute des éléments par rapport à l’ADN et rappelle l’extrême sensibilité à la pollution de la technique utilisée pour analyser l’ADN. En effet, un fonctionnaire de police a laissé le sien sur un des scellés de l’engin incendiaire retrouvé sous la dépanneuse alors même qu’il est formé à manipuler les scellés pour éviter cela.

Ivan donne à la juge et au procureur un article du Canard Enchainé daté du 4 avril 2012 et concernant l’affaire Mérah. Celui-ci montre les relations qu’entretiennent la Section Antiterroriste, le Parquet et les pouvoirs politiques. Il dit que le pouvoir politique donne des instructions à la Section Antiterroriste, qu’il incite le parquet à lancer des procédures antiterroristes. Cet article montre que l’arrestation des supposés membres de la MAAF est politique. Il donne un autre exemple : la note de la chancellerie de Dati qui montre comment les services de justice servent des intérêts politiques pour la répression des luttes. Cette note recommande aux services de police de prévenir la Section Antiterroriste dès qu’une affaire concernerait la MAAF. Enfin Ivan donne à la juge une interview de Michelle Alliot-Marie publiée par le Figaro le 1er février 2008. La ministre de l’intérieur disait déjà à l’époque qu’il y avait une résurgence du terrorisme d’extrême gauche (article publié dans Mauvaises intentions 1). Elle parle à propos des fumigènes de « véritables engins explosifs ». C’est dire à quel point l’instruction a été menée à charge et cela dès le début de l’affaire.

Javier donne deux exemples qui rendent compte que l’instruction a été conduite à charge et montrent que les flics ont voulu faire coller des indices à une hypothèse de départ. Javier ajoute que la juge passe une heure trente à parler des actions de solidarité (actions pour lesquelles aucun des accusés n’est inculpé), alors qu’elle passe vite sur le fait que ni les caméras de vidéosurveillance, ni les témoignages des voisins, ni le bornage des portables n’ont mis en évidence la présence des inculpés sur le lieu où l’engin a été retrouvé. Il revient ensuite sur la manière dont ont été conduits les interrogatoires faits à ses proches, les policiers orientant les questions, manipulant les propos tenus et exerçant diverses pressions.

Inès dit que lors du mouvement Anti-CPE, Anti-centre de rétention, Anti-élections de Sarkozy, il y a eu beaucoup de sabotages et d’incendies de voitures répertoriés par la police, pourtant aucun, à part ceux en cause dans ce procès, n’a été qualifié d’acte terroriste.

Le procureur donne des pièces à la défense et aux juges : une série d’articles qu’il a trouvé sur Indymédia Paris parlant du procès en cours. Il répond ainsi à des pièces données par Ivan aux juges et au proc : tous les articles publiés lors d’une seule journée lambda sur Indymédia en l’occurrence celle du 11 mai 2012. Ivan voulait montrer la diversité politique du site. Le proc a voulu prouver à son tour que le ton général d’Indymédia était attribué à la MAAF.

Réquisition du procureur de Paris chargé de la lutte anti-terroriste, Olivier Christen :

Les citations ne sont pas exactes, mais nous avons essayé d’être le plus fidèle possible…

« Depuis lundi, 6 jeunes personnes passent en procès anti-terroriste.

Dès qu’on en venait à un point qui abordait l’idéologie, les prévenus parlaient de procès politique. Essayer de comprendre ce qu’était la MAAF faisait de ce procès un procès politique.

Mais ce n’est pas un procès politique. S’ils le disent c’est pour ne pas répondre aux questions, c’est pour avoir du panache. On n’est pas à Berlin en 33, à Moscou en 36 ou à Pékin. Madame la présidente, Messieurs du tribunal, peu importe les courants politiques dont les prévenus se sentent proches, peu importe qu’ils soient fascistes, anarchistes ou maoïstes, ce n’est pas ça qui nous intéresse.

S’ils comparaissent aujourd’hui devant vous, c’est parce qu’ils ont commis des actes dont le seul objectif était de troubler gravement l’ordre public, par l’intimidation et la terreur, et de créer un climat d’intimidation et de terreur. Aucune bombe n’a explosé et je sais que nous ne sommes pas face à Jean-Marc Rouillan ou Nathalie Ménigon, même s’il semble que certains aient eu de la sympathie pour leur cause. Pourtant vouloir créer la terreur et ne pas y parvenir ne change pas grand chose aux objectifs des prévenus. Ce qui est réprimé c’est les intentions qui existaient derrière les actions qui sont commises. Je vais donc retenir la qualification de terroriste car leur unique objectif était de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation et la terreur. »

Retour sur Vierzon.

« L’expertise des produits chimiques retrouvés dans la voiture montre qu’ils peuvent entrer dans la composition d’une bombe. Et même si Inès assume seule l’appartenance de ces produits, la police a retrouvé chez Frank des pétards et des documents sur la prison pour mineurs de Porcheville : des pétards pour la mise à feu et des tracts sur la prison de Porcheville (or, dans la voiture, la police a retrouvé des plans de cette même prison). Tout coïncide. Inès et Frank voulaient cacher le matériel loin de Paris et en avaient connaissance tous les deux. Ils sont manipulateurs, menteurs et adeptes de la violence. »

« Trois séries de faits commis entre 2007 et 2008 sont jugés aujourd’hui :

-  Une tentative d’attentat contre un véhicule de police le 2 mai 2007. Si les six bouteilles remplies d’essences avaient brûlé les conséquences auraient été dévastatrices, car la rue est en pente, et cela aurait incendié tous les véhicules en contre bas. Ils n’ont pas d’alibis, aucune explication. Ils nient tous et insistent sur le fait qu’il n’y a que l’ADN comme élément à charge. Mais cette théorie ne tient pas la route. Il n’y a pas que l’ADN retrouvé sur l’engin comme élément à charge, il y a trois ADN de personnes qui se connaissent et qui sont connus pour des actions violentes. Les inculpés ont tenté de faire une contestation de la preuve ADN, ce n’est que du verbiage.

-  Manifestation contre le centre de rétention de Vincennes qui se conclut par des échauffourées avec les forces de l’ordre. Les produits retrouvés sur Ivan et Bruno peuvent être utilisés comme des fumigènes, ils peuvent aussi initier des incendies. L’expert est clair sur le fait que le matériel découvert pouvait être utilisé pour faire des fumigènes mais également des explosifs ou initier des incendies. Si la première expertise parlait d’un engin explosif, la seconde nous fait relativiser mais ne les innocente pas pour autant. De plus, les prévenus se sont entendus en garde-à-vue pour dire que c’était un fumigène. C’est bien que cette position commune affirmant qu’il s’agit de fumigènes est une version mensongère. Leur but était d’en découdre avec les forces de l’ordre et de déclencher un incendie aux alentours du centre. Si au départ l’enquête n’était pas suivie par l’anti-terrorisme, elle le devient lorsque d’autres prévenus connus par ces derniers se font arrêter avec les mêmes produits. Ce n’est donc pas une évolution opportuniste du parquet de Paris mais simplement des éléments nouveaux qui sont entrés dans la procédure.

-  Le 12 avril 2006, lors du mouvement Anti-CPE, un engin incendiaire est retrouvé dans une armoire électrique de la SNCF. D’autres armoires électriques de la SNCF sont brûlées dans toute l’Ile de France durant cette période. C’était le même mode opératoire, ces infractions sont donc liées à une entreprise terroriste. (Le proc fait une description du dispositif incendiaire qui a fait long feu). Si l’engin avait brûlé, il y aurait eu un arrêt immédiat du trafic. Un article du Parisien en Essonne annonce qu’une action réussie de ce type entraînerait le blocage de 200 000 personnes se rendant au travail le matin. Son effet aurait été dévastateur. Le type de dispositif est le même que le dispositif retrouvé sous la dépanneuse, et il correspond exactement au modèle décrit dans l’ouvrage que la police retrouve dans la voiture d’Inès et Frank. »

« Je retiens la qualification de membres d’une association de malfaiteurs ayant pour objectif de préparer des actes de terrorisme car :

-  La définition légale du terrorisme se trouve dans l’article 421-1 du code pénal et indique que pour que l’infraction soit terroriste, il faut qu’elle soit commise intentionnellement par une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation et la terreur.

-  Ils participent tous à la même entreprise, avec un dessein formé et un plan concerté qui se traduit par des efforts coordonnés en vue d’objectifs à atteindre. S’ils ne se revendiquent d’aucun groupe, ils rejettent de la même façon, les mêmes choses (littérature commune).

-  Ils ont le même objectif : saboter le monde et déstabiliser l’état, c’est l’objectif anarchiste. La cible identifiée, c’est bien ce que représente l’Etat : les services de police, l’administration pénitentiaire, les transports, tout ce qui aide à la bonne marche de la société…

-  Ils sont tous de la Mouvance Anarcho-Autonome Francilienne et cela malgré la défense des inculpés qui prétendent que c’est une construction policière. Les termes de MAAF sont clairs, même si la définition n’est pas parfaite. Tout le monde sait très bien ce qu’elle représente.

C’est normal qu’ils ne se revendiquent d’aucun groupe, ni d’aucune organisation car les anarchistes ne reconnaissent aucun maître. Le recoupement des services de police n’est pas le fruit du hasard mais le fait que ces gens se retrouvent derrière l’objectif de déstabiliser l’Etat.

-  L’entreprise est collective, parce que les gens que vous avez devant vous agissent en qualité de co-auteurs, mais elle est également collective parce qu’elle rentre dans un cadre plus global qui se développe grâce à des vecteurs de communication tels que le site Indymedia.

La cote D 397 du dossier fait état d’un message anonyme posté sur ce site le 20 avril 2006, qui appelle à commettre des dégradations sur le réseau ferroviaire. Cet appel à commettre des actions de sabotage est semblable à l’action commise par Javier en avril de la même année.

D’ailleurs, ce lien qu’ils peuvent avoir avec ce site, les prévenus ne s’y sont pas trompés. On a tous senti un certain embarras de leur part lorsqu’on abordait le problème de ce site. Un certain embarras parce qu’on a essayé de nous faire croire que c’est un site sur lequel se trouvent des messages d’une importance secondaire. Que c’est un média libre, sur lequel chacun est libre de s’exprimer comme il le souhaite. Mais dans ce site, tout est extrêmement orienté, ce site est orienté vers les théories anarchistes. Le problème n’est pas que ce site soit terroriste ou non, le problème est qu’il fait le relais d’actes qui peuvent être violents et qui peuvent déstabiliser l’état. On rappellera aussi le lien qu’ont les mis en examen avec des personnes qui partagent le même point de vue, internationalement, on l’a vu avec les semaines de solidarité, lors desquelles on a pu assister à des comportements violents, depuis les quatre coins du globe.

-  Les intentions concertées qui regroupent les six prévenus dans une association de malfaiteurs sont un incendie de véhicule au risque de blesser de gens, un incendie aux alentours du centre de rétention de Vincennes, un blocage de la circulation des trains dont les buts étaient de déstabiliser l’état. Ces actions sont coordonnées et concertées et cela créé un climat d’intimidation et de terreur.

-  L’association de malfaiteur : tous avaient des liens personnels et ceux-ci étaient utilisés pour préparer des actes de terreur. Les petites amies de deux des prévenus « censées ne pas se connaître » avaient très régulièrement des conversations téléphoniques.

-  Il n’y a pas de groupement formé, il y a une entente entre eux pour préparer des actes de terrorisme. En fait nous ne sommes pas devant six personnes dont le seul objectif dans la vie est de commettre des actes terroristes. Nous sommes face à six personnes qui, au gré des opportunités, s’alliaient et s’entendaient pour commettre des actes terroristes.

« Il n’y a donc aucun obstacle pour les juger pour terrorisme et association de malfaiteurs. Ils étaient coordonnés pour préparer des actes de terrorisme, ils devaient tous se retrouver au centre de rétention de Vincennes pour la manifestation mais ce fut un échec car trois d’entre eux se sont fait arrêter avant. Il y a eu entente sinon Inès et Frank n’auraient pas voulu déplacer le matériel explosif et incendiaire en Creuse. Et il y a eu concertation sur les moyens mis en œuvre pour incendier des voitures et des armoires électriques. Enfin il y a eu concertation sur le refus systématique du fichage. »

« Alors que tous contestent la société et son système élitiste, tous sont très heureux de vivre avec les impôts payés par les gens qui travaillent. »

« Je les déclare tous coupables des faits reprochés :
- Participation à un groupement formé en vue de la préparation d’actes de terrorisme (pour les six)
- Fabrication d’engins explosif ou incendiaire (pour trois)
- Tentative (ou complicité de tentative) de dégradation ou de destruction d’un bien appartenant à autrui (pour trois)
- Détention et transport de produits incendiaires ou explosifs (pour quatre)
- Refus de se soumettre au prélèvement ADN (pour Damien). Il abandonne cette charge pour Ivan et Bruno. La justification est dans l’absence de Procès Verbaux individuels, seul un PV collectif fait état du refus, il n’est donc pas suffisant.
- Refus de soumettre aux prises d’empreintes digitales et aux photos (pour trois)

– Inès a trois ans de prison dont un an ferme.

– Javier à trois ans dont un an ferme, plus deux ans de sursis avec mise à l’épreuve.

– Damien à deux ans dont un an ferme.

– Frank deux ans dont six mois ferme.

– Ivan un an dont six mois ferme.

– Bruno un an dont six mois ferme. »

 

Plaidoiries

 

La transcription des plaidoiries n’est pas du tout exhaustive. Il faut tenir compte du fait que le discours des avocats n’est pas forcément le même que celui des inculpés. Nous faisons le choix de ne produire dans les plaidoiries que les parties qui nous semblent intéressantes pour la défense.

Maître Louise TORT pour Bruno :

« Le refus de prélèvement Adn a été retiré par le procureur. Cela aurait pu être fait dès le début de l’affaire. Cet exemple est révélateur de la conduite de l’ensemble de l’instruction.

Dans toutes les manifestations, des gens utilisent des fumigènes pour être visibles et exprimer leur solidarité (même dans les matchs de foot).

Il n’y a pas eu de concertation en garde à vue, Bruno a simplement crié depuis sa cellule qu’il transportait des fumigènes et non une bombe. Il n’y a d’ailleurs aucune preuve de cette concertation à part un simple PV.

Bruno n’avait aucun intérêt à mettre du curcuma dans un engin incendiaire ou explosif. Par contre, il en avait pour un fumigène : fumée jaune. En plus l’expertise dit que le mélange est difficilement inflammable, qu’il propage difficilement le feu. L’expertise + le contexte de la manifestation à proximité du lieu d’arrestation + la déclaration de Bruno lors de sa garde à vue et tout le long de l’instruction sont des éléments suffisants pour dire que Bruno allait à cette manifestation et qu’il allait utiliser les fumigènes pour se rendre visible des détenus du centre de rétention.

Le peu de contact avec les autres prévenus dont la police a fait état dans le dossier ne peuvent laisser penser à une entente ou à une association de malfaiteurs. Le fait de reconnaître des visages et de partager des opinions ne prouvent pas une entente. Le fait de participer à des actions publiques n’est pas du terrorisme.

Vous lui reprochez de toucher le RSA, pourtant son passage en prison a coûté beaucoup plus cher à l’Etat : un détenu coute en moyenne à l’Etat 100 euros par jour ! »

Elle demande la relaxe totale.

Maître Delphine BOESEL pour Ivan :

Avant de plaider, elle remet au tribunal des conclusions écrites. « Il n’y a pas eu de concertation en garde à vue pour dire que c’était des fumigènes. Le Procès verbal qui fait état de cette concertation est postérieur au procès verbal de l’interrogatoire d’Ivan qui dit que c’est des fumigènes.

Cette instruction a été menée à charge car dès le 20 janvier 2008, l’expertise atteste que ce mélange ne produit qu’une simple fumée. Pourtant ca a mis un an pour avoir l’expertise finale qui innocente Ivan et Bruno.

Je ne vois pas comment le tribunal pourra conclure que les prévenus ont préparé des actes terroristes. Où sont les actes violents ?

Si l’association de malfaiteur est prouvée par une simple lettre écrite par Ivan où il indique connaître Javier et Inès : alors les preuves ne sont pas sérieuses. Si au début il a nié les connaître c’est à cause de l’ampleur que cette histoire a pris, il a pris peur.

Indymedia n’est pas un organe de communication de la MAAF. C’est un site public et libre. Sa charte interdit les propos racistes, sexistes et homophobes.

C’est scandaleux qu’on puisse être poursuivi sous une accusation de terroriste pendant quatre ans pour une simple participation à une manifestation, c’est une dérive de notre société. Votre rôle, Madame la juge, est d’éviter de criminaliser les mouvements sociaux, la contestation. »

Elle demande la relaxe sauf pour le refus de signalisation (empreintes, photos). Elle demande aussi la non inscription de la condamnation (s’il y a !) au bulletin numéro 2 du casier judiciaire.

Maître Charlotte PLANTIN pour Inès :

« La MAAF est une construction policière artificielle. Aucun prévenu ne s’est revendiqué de cette mouvance. A tous les gens qui ont été interrogés dans l’entourage d’Inès, la police a posé la question « Saviez vous qu’Inès se revendiquait de la MAAF ? ». Si aucun n’a approuvé, reste que les questions sont orientées.

Une Garde à vue de 96 heures dans les locaux de la SDAT exerce une pression importante sur les prévenus, ce n’est pas un fantasme comme l’a signifié le procureur.

Inès est restée un an et quatorze jours en préventive en tant que Détenu Particulièrement Surveillée. Elle a été transférée beaucoup de fois, dont une fois pour un dessin de la cour de promenade qu’elle avait fait. On l’avait alors accusée de préparer une évasion…

Les doses de Chlorate de potassium retrouvées dans la voiture sont très petites (180 comprimés contre la grippe font 36 grammes…). Le chlorate de sodium devait servir à dessoucher un arbre ou à faire des fumigènes. Les livres trouvés sont trouvables (pour l’un) sur Internet. Pour aucun des produits, la possession n’est illégal.

Si ma cliente a eu peur de manière irrationnelle, c’est normal vu comment le dossier a été construit : les produits sont vus tout de suite comme des explosifs.

L’ADN n’explique pas tout. Il est volatile, il peut se retrouver à plusieurs endroits. Pour ma cliente, sa présence est fortuite. Et cette explication est tout aussi valable pour Damien et Javier. Des acquittements ont été prononcés quand il n’y avait que l’ADN comme élément de culpabilité. »

Elle demande la relaxe totale ainsi que la non inscription de la condamnation (s’il y a !) au bulletin numéro 2 du casier judiciaire.

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5ème jour de procès, le mardi 22 mai 2012 à la 10ème chambre du TGI de paris

Maître Jean-Alain MICHEL pour Inès :

« Les produits retrouvés dans la voiture ne sont pas suffisants pour faire une bombe. Il peuvent servir à, mais ils ne suffisent pas. Comment peut-on dire alors qu’elle ait eu l’intention de ? La possession de ces produits n’est pas illégale.

Je ne rentrerai pas dans le débat sur l’ADN. Pour la discussion, j’accepte que le cheveu d’Inès ait été retrouvé sur l’engin incendiaire. Mais un cheveu ca bouge, ca vole, c’est volatile par définition. On perd entre 30 et 50 cheveux par jour.

Imaginons que l’engin ait été fabriqué dans une pièce où était Inès. Elle ne le fabrique pas, mais son cheveu vole, se pose et reste sur l’engin qui sera ensuite posé sous la dépanneuse. L’ADN ne suffit pas à condamner Inès pour la fabrication de cet engin, ni d’ailleurs pour la pose.

La MAAF a t-elle une hiérarchie, une structure, des liens avec l’étranger ? Rien n’a été démontré, l’instruction dit simplement qu’elle est une structure organisée. La MAAF est une construction intellectuelle.

Concernant ces soi-disant actes terroristes, on a le sentiment qu’il y a deux poids, deux mesures. J’ai fait une étude sur les incendies de voitures : il y en a eu plus de 1000 voitures brûlées en 2011 ; cela en fait-il pour autant plus de 1000 actes terroristes ? Non cela relève du fait divers.

Idem pour le saccage de la sous préfecture de Compiègne par les Contis, les syndicaliste de Continental : alors que les dégâts sont très importants, ils ne sont condamnés qu’à 2000 ou 4000 euros d’amendes.

La définition mondialement acceptée du terrorisme parle d’atteinte aux personnes. Seule la législation française a élargi la qualification.

La police a construit une entreprise, une entente : c’est nécessaire que ces affaires existent pour justifier leur existence. Ce n’est pas parce que certains se connaissent ou qu’ils sont d’accord politiquement qu’ils s’entendent pour déstabiliser l’Etat ! Une des traditions française est de vouloir des dangers intérieurs. Le parquet a-t-il pu montrer dans ce groupe terroriste un chef, un sous chef, un exécutant, des soutiens à l’étranger ? Non et aucun des inculpés n’a de rôle précis dans ce soi-disant groupe.

La solidarité devient une charge.

Les médias ont déclaré dès hier que les prévenus étaient condamnés. Vous allez devoir être plus indépendante que jamais Madame la juge. Vous allez tous les relaxer. Même si vous ne lui rendrez pas son année passée en prison. »

Il demande la relaxe totale.

Maître Christine MARTINEAU pour Damien :

« Quelle surprise de les avoir vus mis en examen en terrorisme. On n’a jamais vu ces faits là qualifiés de terrorisme ! Derrière cette inculpation, il y a un contexte politique qui a donné lieu à la création de la MAAF et qui explique pourquoi cette affaire est jugée en antiterrorisme. L’histoire donne raison à des luttes.

L’ADN n’est pas une preuve de la culpabilité mais un indice. Il n’est pas toujours fiable, il est volatile, il peut y avoir des transferts. Il y a une trace sur le bouchon d’une des six bouteilles et ca l’incrimine pour fabrication d’un engin incendiaire ? Beaucoup s’élèvent contre l’utilisation de l’ADN comme preuve, y compris dans les milieux scientifiques. Les bouteilles circulent dans les manifs, les réunions, les squats. L’instruction l’a finalement désigné comme complice (il aurait fabriqué l’engin mais ne l’aurait pas posé) cela montre une contradiction évidente : en quoi cela prouve tel ou tel rôle ? Qui voudrait il terroriser, intimider ? les policiers ? les passants ?

Le contexte politique c’est le mouvement Anti CPE, c’est les luttes contre les centres de rétention, ce sont les manifestations post électorales : ce sont des mouvements où participaient des milliers de gens. En fait on glisse vers la stigmatisation des opinions dissidentes, vers la criminalisation des mouvements sociaux pour aboutir à la création de la MAAF.

Sur le prélèvement ADN, aucun procès verbal n’indique s’il le refuse ou pas car on ne lui a pas demandé. Et puis une jurisprudence dit que si on n’a rien à faire avec les faits reprochés, on peut refuser.

C’est scandaleux de comparer la tentative d’incendie de l’armoire électrique de la SNCF aux attentats de 95. Sur les dégâts qu’auraient pu causer l’incendie de la dépanneuse, il faut être raisonnable : vu que la dépanneuse est costaud, les neuf litres d’essence auraient à peine brûlé le dessous du véhicule. Et puis vu que la rue est en pente, l’essence aurait coulé sans pour autant brûler d’autres voitures. Neuf litres ne sont pas assez ! »

Elle demande la relaxe totale.

Maître Noémie DI MAYO pour Javier :

« Il faut rappeler le contexte dans lequel se sont déroulées les arrestations : des consignes étaient données par Michèle Alliot Marie et Rachida Dati. C’était une chasse aux sorcières.

L’instruction a été conduite à charge.

Aucun élément ne justifie l’arrestation de Javier : il n’a pas été arrêté après l’évacuation d’un squat comme l’instruction le raconte, mais dans la rue car il ne s’est pas présenté à une convocation pour un permis de visite à sa sœur incarcérée. Dans le dossier, j’ai relevé plusieurs contre-vérités, voire des mensonges. Les interrogatoires des proches ont par exemple été retravaillés dans le sens des policiers.

Beaucoup de doutes persistent sur l’affaire. Concernant l’ « entente terroriste » :
- est-ce que partager des opinions avec sa sœur est un élément ?
- le procès donne à croire que tous participaient aux mêmes actions et manifestations, pourtant Javier n’était ni à l’occupation de la mairie du 19ème ni à la manif contre le centre de rétention de Vincennes.
- la lettre d’Ivan ne veut pas dire que c’est une amitié pérenne.
- Il n’y a aucun acte préparatif, aucune revendication.
- La téléphonie ne donne rien à part de manière indirecte.

L’ADN devient ici la reine des preuves. Des scientifiques eux mêmes expliquent pourquoi l’Adn ne peut pas être la reine des preuves. Ainsi un article du Monde démontre que l’ADN ne peut pas être pris comme seule preuve (Jean-Marc Manach du 10 décembre 2010). Il faut qu’il soit confirmé par d’autres éléments de preuve. Vous devez comprendre comment marche la preuve ADN, pour bien juger l’affaire.

Vous ne devez pas prendre les conclusions de ce dossier concernant l’Adn comme un matériau brut et une évidence. Dans ce dossier, des éléments posent question. En effet, dans le processus d’identification par l’Adn, il peut survenir des erreurs à différents moments : lors du prélèvement de l’Adn, mais aussi lors de la manipulation des scellés, où des échantillons peuvent être interchangés ou contaminés… Il peut aussi y avoir des erreurs dans le calcul des probabilités qui sont associées à la présentation des résultats Adn.

On dit « l’Adn » et pourtant, il ne s’agit pas de tout l’Adn d’une personne, il ne s’agit que d’un profil, de quelques points, ou loci, de toute la molécule Adn. Deux profils peuvent donc être semblables alors même que les deux Adn de deux personnes différentes sont bien différents (ce dont on se rendrait compte si on l’analysait en totalité).

Ce n’est jamais à une totale correspondance entre une trace et une personne que les experts concluent ; c’est toujours à une absence de discordance. Ils l’écrivent eux-mêmes ; et c’est pour cela que les conclusions des experts sont toujours accompagnées d’une probabilité. Par exemple, une probabilité qui dit à quel point il est probable que l’Adn analysé ne corresponde pas à celui de Javier. Or ces probabilités sont établies à partir de bases de données qui ne sont même pas décrites dans le dossier. On peut donc interroger la pertinence de ces bases de données, et donc des chiffres de probabilité. Dans l’affaire SNCF, il existe un problème chronologique. Le premier rapprochement entre Javier et un des scellés date de septembre 2009, alors que l’Adn de Javier aurait été prélevé sur un de ces vêtements en mai 2008. De plus, dans l’ordonnance de non-lieu qui clôt l’enquête concernant les armoires électriques SNCF, il est bien stipulé que ce dossier ne présente aucune trace Adn exploitable. Comment une trace inexploitable peut-elle tout à coup devenir exploitable ? En outre, il est surprenant que le premier rapport Adn concernant ces affaires SNCF soit tout simplement absent du dossier. Et ce d’autant plus qu’au départ, Javier n’est accusé que sur la base d’une seule trace sur un scellé, et il est bien précisé qu’il n’y a pas de trace de son Adn sur les autres scellés. Puis, en avril 2010, les experts indiquent un nouveau rapprochement sur un autre scellé. Comment une nouvelle trace Adn a-t-elle pu soudain apparaître ? Cela est d’autant plus intrigant que la première trace retrouvée est issue d’un mélange et comporte peu de loci tandis que la seconde n’est pas issue d’un mélange et présente plus de loci. Il est tout de même étrange que les experts aient retrouvé la première trace et non la seconde, vu ses caractéristiques.

En outre, à l’époque, le premier rapport d’expertise conclut à des traces Adn présentes sur deux autres scellés (il ne s’agit pas d’Adn rattachés à Javier). Or, en 2010, ces deux traces ont tout à fait disparu. Si on constate que des Adn qui semblaient pourtant présents à l’époque ont tout simplement disparu, comment alors peut-on expliquer à l’inverse qu’une nouvelle trace puisse apparaître ?

En tout cas, en fonction des techniques utilisées, en fonction des experts mandatés, on voit bien que les résultats diffèrent. On ne peut donc qu’avoir une attitude de doute quant aux conclusions des expertises.

Les probabilités qui sont associées aux rapprochements Adn avec Javier sont de l’ordre de 1 sur la population mondiale. Ces chiffres donnent le vertige. Mais on peut se demander : comment calcule-t-on ces probabilités ? D’où viennent les bases de données qui servent à les calculer ? Dans le dossier, on ne trouve que deux éléments de réponse. Le premier est que les bases de données proviennent du « distributeur de réactifs Applera ». Le second est qu’elles émanent de « revues internationales » et d’ « études de la population française effectuées par le laboratoire ». Ces bases de données sont extrêmement floues. Il n’est donc pas possible de comprendre comment sont calculées ces probabilités.

On se pose donc la question de la légitimité de cette preuve. Concernant l’affaire de la dépanneuse, Javier a toujours demandé quel était le matériel biologique en question, on ne lui a jamais répondu. Mais l’idée qui est sous-tendue dans le dossier est qu’il s’agirait de salive car c’est lui qui aurait allumé la cigarette qui servirait de retardateur à l’engin incendiaire. Mais comment aurait-il fait pour mettre sa salive dessus alors que la cigarette est collée ou attachée au fagot d’allumettes qui l’entoure ? Impossible de remettre la cigarette dans le fagot, cela prendrait trop de temps.

Il n’y a pas de définition des contours de la MAAF, c’est un fourre tout. La MAAF ainsi que le terrorisme sont des constructions idéologiques.

Les effets dévastateurs dont parle le procureur au sujet de l’arrêt du trafic concernent aussi les grèves ? Une grève est un acte terrorisant ?

Si vraiment le 18ème arrondissement de Paris avait échappé à un attentat terroriste, les journaux en auraient parlé. Sur un PV sur des incendies de voiture, la police parle de faits dont la gravité est relativement faible. En fait cela dépend des envies et nécessités politiques du moment, c’est de l’opportunisme de qualifier pour certains des actes de terroristes et pour d’autres d’actes peu graves.

Autre exemple : une action revendiquée par un groupe d’extrême droite, nomad 88 (hiérarchisé et structuré), où ils ont tiré sur des noirs et des arabes. Des armes ont été retrouvées chez eux : eux ne sont pas poursuivis pour terrorisme ! »

Elle demande la relaxe totale. S’il y a condamnation, l’avocate demande que Javier n’ait pas les deux ans de mise à l’épreuve. Et dans tous les cas, une non inscription de la condamnation (s’il y a !) au casier judiciaire.

Maître Laurence BEDOSSA pour Frank :

« Le procureur parle de Frank comme un « menteur, un manipulateur, un lâche » et il les associe finalement aux termes de terrorisme, d’intimidation, de terreur. Frank n’était pas au courant du contenu du sac d’Inès. S’il n’avait pas été fiché, cette histoire n’aurait jamais eu cette ampleur. Le dossier est vide. Le seul fait reproché à Frank est celui de participer à des manifestations et de posséder de la lecture subversive. »

Elle demande la relaxe totale et remet des conclusions écrites.

Dernières interventions de Frank et d’Ivan sur la construction de la MAAF et sur le fichage.

LE DÉLIBÉRÉ sera rendu LE 25 JUIN À 13H30 à la 10EME CHAMBRE DU TGI DE PARIS.

SOLIDARITÉ AVEC LES INCULPÉS !

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[Lu sur Indymedia Paris le 2 juin 2012]

Publié dans contrôle social, contrôle policier, general, guerre sociale, mauvaises intentions, solidarité | Commentaires fermés sur [Mauvaises Intentions] Compte-rendu des derniers jours du procès antiterroriste

[Paname] Ils veulent des balances, ce sera pas nous !

Il y a quelques temps dans une ville d’Ile-de-France, deux flics en uniforme chopent physiquement un copain. Il est 7h du matin, et il descend l’escalier du métro. Le premier lui demande ses papiers, l’autre l’immobilise immédiatement par le bras. Ce n’est qu’un prétexte pour l’embarquer au commissariat. Quelques minutes après être arrivé, on l’emmène dans un bureau où se trouve le même porc en civil qui avait déjà voulu lui poser des questions de façon officieuse. Comme la fois précédente, l’entretien tourne court. En voici un extrait :

– Tu étais où ces derniers temps ?
– Je suis là maintenant !
– Quelle est ton adresse postale ?
– Je n’ai pas d’adresse…
– Si t’en as une…
– Non, je dors à droite à gauche (…)
– Tu vis comment ?
– Je me démerde…
– On sait bien que tu es venu ici pour travailler, pour avoir des papiers, pour ramener de l’argent dans ton pays !
– Je suis pas venu pour ça, je suis venu pour voir.
– Arrête de penser qu’on est des méchants !
– (silence)
– Tu veux un café ?
– Non
– De l’eau ?
– Non
– Pourquoi tu n’acceptes pas ?
– Je ne veux pas donner mon ADN.
– Si on veut le prendre, on peut aller chez toi, même si t’as rien fait ! Vas-y tu peux sortir !
– Donne-moi un papier de fin de garde-à-vue !
– Il n’y a pas de papier à te donner. C’est comme la première fois. (Il se lève)
– Lors de la prochaine arrestation, on n’en restera pas là !
– Moi, aussi je vais faire quelque chose !
– Tu vas faire quoi ? (énervé)
– … je vais rentrer au bled, bien sûr ! (ironique)
– Même hors de France, on sait où te trouver…

Le lendemain, et jusqu’à aujourd’hui, des keufs en civil ont été grillés en train de suivre le copain dans la rue et le métro.

Ce n’est pas la première fois que la police tente de recruter des indics, des poukaves, des délateurs… des balances quoi, au sein des milieux squat, antifas ou pseudos anarcho-autonomes. Que ce soit à Paris, dans sa banlieue, à Lyon, à Notre-Dame-des-Landes ou en Belgique (une quinzaine de camarades interrogés de façon officieuse), les porcs aimeraient bien obtenir des renseignements ou recouper leurs propres observations, souvent grossières, pour faire tomber des camarades. Faire pression, faire du chantage lié à une situation sociale ou judiciaire, ou menacer de prison est monnaie courante un peu partout.

Face au silence sur ces histoires, à la peur ou la paranoïa, plusieurs camarades de différentes villes ont déjà choisi de rendre publics ces coups de pression et autres mesquines tentatives d’en faire des indics. A Paname, les chtars ont enlevé par surprise un copain dans la rue, suite à un premier refus de collaborer. Avec leur cerveau imbibé d’autorité, avec le fric des puissants qu’ils protègent, ils croient peut-être que tout s’achète et se vend, même les idées, même la dignité.

Dans leurs petits jeux dégueulasses, ce n’est pas seulement à quelques personnes qu’ils s’en prennent un peu partout. C’est aussi à un antagonisme social qui leur échappe en partie, à une rage qui tente de balayer ce système d’exploitation et de domination.

Que leurs coups de pression ne restent pas sans réponse !

Des ennemis de la police et de son monde

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[Publié sur Indymedia Nantes le 2 juin 2012]

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[« Affaire de Chambery »] Compte rendu et reflexions relatives au procès de Mike, R, J, et Wiliam

Dans la nuit du 30 avril au premier mai 2009 [note de cestdejatoutdesuite : on a corrigé l’erreur factuel sur l’année indiquée], à Cognin, près de Chambéry, soufflé-e-s par l’explosion d’un engin explosif artisanal, Zoé mourait, presque sur le coup, tandis que Mike, grièvement blessé, parvenait à sortir de l’usine abandonnée dans laquelle ils se trouvaient.

La police et les secours débarquent vite sur les lieux, alertés par le voisinage. Mike et le corps de Zoé sont identifiés. La sous-division anti-terroriste (SDAT) est chargée de l’enquête. Quelques jours plus tard, trois perquisitions sont exécutées dans trois maisons squattées. Celle où vivait Zoé, un lieu d’habitation pour quatre personnes devant lequel restait en général garé le camion de Mike, ainsi que Les Pilos, lieu d’habitation et d’activités proche du centre-ville. Mike est déjà placé en détention préventive au régime grand blessé à l’UHSI (Unité Hospitalière Sécuritaire Inter-régionale) de Lyon. Il y restera deux mois. Puis R, J, William, et N1N1 seront successivement interpellés, dans des conditions variées. Tous, à l’exception de William, passeront un moment en tôle. Respectivement un mois et demi, deux semaines, et trois mois. Tous seront ensuite placés sous contrôle judiciaire, sous un régime plus ou moins strict (assignations à résidence chez les parents, interdiction de se rencontrer, de sortir de tel et tel département ou de France, obligation de pointer chez les flics du coin toutes les semaines…). En 2011, la juge d’instruction de la SDAT se dessaisit du dossier. La fin de l’instruction est confiée au tribunal de Grande Instance de Chambéry, qui accepte la levée de tous les contrôles judiciaires, sauf celui de Mike. Le procès a eu lieu le 25 mai 2012 au tribunal de grande instance Chambéry.

Avant l’audience les keufs filtrent les entrées à la porte du TGI. Ils laissent passer une classe (40 élèves) de lycéens et « leur » prof, des pignoufs qui viennent se faire assermenter, les inculpés et leurs familles [les keufs disent « les proches »_mais, screugneugneu, c’est quoi être « proche », est-ce que partager les idées ne suffirait pas pour se sentir « proche » ?]… et refusent de laisser entrer les quelque 80 personnes venues en soutien. Ballet en plusieurs temps.

Dans un premier temps sept personnes sont autorisées à rentrer dans la salle (en plus des familles). Elles tentent de dégager professeur et élèves, en les prenant à partie les unes après les autres (« c’est pas un spectacle »), pour pouvoir faire rentrer plus de copains. La prof est indécrottable (elle a réservé il y a six mois) et les sept ressortent, tandis que Mike et Rippert se mettent d’accord pour quitter la salle et demander un report si jamais il n’y a pas la possibilité pour tous-te-s d’assister à l’audience. Dehors ça zone plus d’une demi-heure. Ça part mal pour les relations entre les différents avocats, entre Rippert qui s’oriente vers une demande de report et l’avocate de J et R qui leur conseille de rester à l’intérieur de la salle d’audience… Ce qu’ils font d’ailleurs, ainsi que Wiliam et son avocat. La prof s’en va pendant la suspension d’audience à midi. La classe aussi, ça fait de la place à l’intérieur.

Avant même que l’audience commence, on gueule des trucs contre la justice, le bon vieux « mur par mur, pierre par pierre, détruisons toutes les prisons », « flics, matons, assassins » (ou un plus frais « je vous chie dessus » ) avant de se dire qu’on arrivera pas à faire rentrer plus de vingt personnes, et de se mettre d’accord pour faire des roulements entre l’intérieur et l’extérieur. À ce moment-là un journaliste de France 3 qui arrive se fait envoyer sur les roses (il est question de son taf de cloporte, oui oui). D’ailleurs, lui n’a pas trop de mal à rentrer dans le tribunal, en se faisant au passage traiter de charognard. (Idem dans les grandes lignes pour le daubé un peu plus tard) Dehors, sur « l’esplanade raide comme la justice » il y a des banderoles. « on pourrait ne rien faire / laisser faire, si on n’aimait pas la liberté » / « solidarité avec les inculpés » / « la justice ne sert que le pouvoir, à bas l’état » / « ni fric, ni flics, ni prisons, ni nations, libération de toutes les oppressions » , et encore d’autres. Egalement une bouffe, et tables de presses.

Une personne, Mike, comparaît pour transport, fabrication et utilisation d’engin explosif en vue de commettre dégradation ou destruction. Trois autres, J, R et William comparaissent pour destruction de preuves, ce qui constitue une entrave à la justice. Une cinquième personne (n1n1) aurait pu être poursuivie pour destruction de preuve, et n’a pas pu être convoqué pour des raisons techniques (en gros le chef d’inculpation correspondant n’existe pas dans la loi hongroise et n’a donc pas pu être utilisé pour l’extradition. Ce n’est pas possible de le poursuivre pour un chef d’inculpation différent de celui qui a été utilisé pour l’extradition).

Les inculpés ont tous fait de la détention provisoire sauf Wiliam, et ont été placés sous contrôle judiciaire en attendant l’issue du procès. L’affaire a tout d’abord été instruite par la section anti-terroriste. L’enquête menée a conclu que rien ne venait confirmer l’hypothèse du terrorisme (ils ne parviennent pas à constituer l’association de malfaiteurs ni l’existence d’objectifs précis), et l’affaire a ensuite été instruite sous une juridiction « ordinaire ».
Durant la garde à vue, ceux que le juge appelle les trois « nettoyeurs » reconnaissent avoir détruit des brochures, écrits anarchistes. L’un d’eux, William, fait d’autres déclarations. Il parle d’un éventuel lien entre l’explosion et la tenue dans les jours suivant du G8 en Italie. Il rapporte aussi qu’un des quatre lui avait dit que Zoé lui avait dit qu’ils auraient enterré des trucs près de l’usine. Et que J et R reviennent du camion de Zoé en ramenant avec eux un bocal de confiture en verre transparent dans lequel il y a environ 500 grammes d’une substance dont ils supposent sur le moment qu’il peut s’agir de chlorate de soude. Lors d’une audition qui se déroule de nombreux mois après la GAV, devant la juge d’instruction de la SDAT (en présence des trois autres inculpés), les autres inculpés ne comprennent pas très bien s’il maintient ou non ces déclarations. Elles sont de toute manière citées et/ou utilisées à charge par le juge et le procureur durant le procès.

Le procureur requiert un an de prison ferme pour Mike, et pour les trois autres, six mois avec sursis et une amende de 5000 euros chacun. Fait assez rare, la peine demandée par le procureur ne recouvre pas la durée de détention préventive que deux des nettoyeurs se sont fadée. Le rendu aura lieu le 15 juin.

Voilà maintenant un peu plus de précisions sur les plaidoiries et déclarations qui ont été faites au cours du procès, et quelques réflexions qui nous viennent.

Sur les liens….

le juge se contente quasiment d’affirmer qu’ils appartiennent à la fameuse « mouvance anarcho-libertaire » (pratique ça), tout en disant qu’ils ont parfaitement le droit d’avoir des idées contestataires (c’est un juge de Gôche). Il ressort des contrôles d’identité commun pour montrer les liens entre Zoé et deux des « nettoyeurs » en précisant que le jour de l’occupation du consulat du Danemark à Nantes on retrouve dans les personnes contrôlées, en plus de Zoé et J, D. qui a été poursuivie ensuite pour l’explosion du poste des douanes de Rennes en 2007. A vrai dire il n’est pas très précis sur les rapports entre les différents inculpés. Il demande à Mike quand il rencontre Zoé mais pas aux trois autres, il ne creuse pas le lien entre Mike et les autres inculpés, ni les liens entre les personnes accusées de destruction de preuves, tant au niveau humain qu’au niveau des idées. Comparativement au procès des « mauvaises intentions », à paris mi-juin, on ne sent pas la volonté de définir plus précisément les nuances dans les idées/pratiques des différents inculpés. Il affirme que les inculpés appartiennent tous à cette mouvance, ne leur pose pas de question sur leurs « engagements » politiques, (dans des partis, des association de type 1901, ou ou…). Il ne questionne pas le rapport à la violence des uns et des autres, ni même ce qu’il ont pensé des actions de solidarité qui ont eu lieu en grèce. Le truc qu’il va poser précisemment, c’est les provenances des éléments qui participent à la construction de l’engin qui a explosé, en essayant au passage de faire dire à Mike que c’est lui qui s’était chargé d’acheter le chlorate de soude pour ensuite proposer l’expérience à Zoé…(sans succès)…

Sur les stratégies de défense des inculpés…

Les nuances dans le degré de coopération que les inculpés acceptent d’avoir avec la justice, qui ont été présentes tout le long de l’instruction (dans le fait de se présenter ou non de soi-même chez les keufs, d’accepter ou non de balancer des trucs sur ses co-inculpés en gav, de respecter ou non le contrôle judiciaire…) sont présentes aussi au procès. Par exemple dans le choix de répondre plus ou moins longuement aux questions du juge sur la dimension vie professionnelle, projets d’avenirs etc…( en clair est-ce que tu t’es inséré, rangé des bécanes depuis ?). Et le juge ne peut que remarquer la différence de coopération, entre la personne qui lui répond de manière minimale et fait à la fin du procès la lecture d’une déclaration qui met en avant un certain nombre d’idées, et celle qui détaille le déroulement des études de droit qu’il vient d’entreprendre…
Tous les avocats se sont appuyés sur le fait que si les investigations de la SDAT n’avaient pas permis d’établir l’existence d’une association de malfaiteur ni le lien entre l’explosion et les idées portées par les unes et les autres (l’existence d’objectifs précis) c’est qu’il n’existait ni l’une ni l’autre. En gros on fait confiance aux spécialistes, en légitimant au passage le travail de la SDAT qui, c’est bien connu, fait la pluie et le beau temps en matière de terrorisme. Ce qui sous-entend au passage que quand la SDAT conserve les chefs d’inculpations en lien avec une entreprise terroriste, c’est valable. (L’avocat de Wiliam glisse dans sa plaidoirie qu’au vu des stats de la SDAT leurs résultats sont pas géniaux et l’avocate de J et R se fout de leur gueule aussi au passage, mais rien de bien méchant. )

Mike est le seul à comparaître sous les chefs d’inculpation de transport, fabrication et utilisation d’engin explosif en vue de commettre dégradation ou destruction et il est défendu sur ces points par Rippert qui plaide coupable pour les chefs d’inculpations relatifs au transport, à la fabrication et à l’utilisation d’un engin explosif. Puisque les trois délits ont lieu au même moment, ça lui semble absurde de les décomposer. Pour Mike, Rippert plaide non coupable sur la dernière accusation qui introduit une intention (commettre des destruction/dégradations). Rippert revient aussi sur les déclarations de Wiliam en avançant que, quand bien même Mike et Zoé possédaient du sucre dans une boîte à sucre et du chlorate de soude dans un bocal de confiture, le fait de posséder ces éléments de façon séparée n’est pas un délit (pose aussi le fait que chlorate de soude, « détaupeurs », extincteurs sont en vente libre, c’est le fait de mélanger sucre et chlorate par exemple qui est délictueux.) Rippert, avocat grenoblois, ancien mao connu pour ses plaidoiries de rupture, un certain goût pour le spectacle et sa difficulté à travailler avec d’autres avocats, commence sa plaidoirie en renvoyant aux juges leur rôle de défenseurs des intérêts des bourges, ce qui fait toujours plaisir « Vous représentez le pouvoir politique répressif, votre seule mission est de protéger le pouvoir dont vous êtes représentants. ». Il n’évite pas l’aspect dramatique, et rabâche un certain nombre de fois qu’il y a eu deux victimes et parle d’une « justice inhumaine » qui aurait passé deux ans à chercher des victimes qui n’existaient pas et à s’acharner sur les victimes réelles. (c’est sûr, elles n’ont pas fini de faire mal à plein de personnes, la mort et l’absence de Zoé).

Le déroulement de sa plaidoirie est axé sur le fait que ce qui constitue le délit, c’est-à-dire la confection d’un engin explosif, tient entièrement dans la personnalité de Mike et de Zoé. Il répète plusieurs fois qu’ « ils ne sont pas comme vous, ils ne sont pas comme nous », qu’ils avaient « décidé de confectionner une bombinette en amoureux », et « qu’ils voulaient faire péter la société dans leur tête, pas dans la réalité ». Il termine (on ne se refait pas) en les présentant comme des avant-gardistes, des précurseurs des combats de la période à venir, et de tous ces pauvres qui vont se révolter contre l’injustice, contre l’inégalité. Cette articulation complexe et à laquelle on peut opposer un certain nombre de critiques, a pour objectif de répondre à la question des intentions. Aux questions du juge sur le pourquoi, Mike répond qu’il s’agissait de « faire une expérience », et son avocat, tout en re-situant cette expérience dans le domaine du fantasme, met en avant leur « rage et les engagements » , en expliquant que dans ce monde basé sur les injustices, les « pauvres » doivent bien avoir « envie de tout faire péter ».

J et R sont défendus ensemble par l’avocate qui les a suivi pendant les trois années. William est défendu seul par un autre avocat. Concernant les déclarations qu’il a faites, et qui chargent les co-accusés, il répétera plusieurs fois « j’ai menti ». Les deux avocats de J, R et Wiliam appuient leur argumentation sur le fait qu’il y a eu flagrant délit en ce qui concerne l’utilisation d’explosif car la police est arrivée rapidement sur les lieux. Par conséquent, la destruction des brochures ne peut pas faire obstacle à la découverte de la verité, et pour cette raison ils demandent la relaxe. Mais dans la suite de leur argumentation, ils en viennent parfois à parler de « coupable » en ce qui concerne le « délit principal », alors même que la culpabilité de Mike n’est pas établie en ce qui concerne une intentionnalité, ou pas, dans l’utilisation de l’explosif.
D’autre part, une partie de l’argumentation revient à dire que la destruction des brochures n’avait pas pour objectif d’entraver la justice, parce que sinon, plutot que des brochures, les nettoyeurs auraient pris…( suit une série d’objets qui ont été saisis par la police, et dont la présence est mentionnée dans les procès verbaux). Ce qui pourrait sous entendre que ces objets cités auraient un caractère compromettant, et que dans une optique de chercher à innocenter leur détenteurs, il aurait fallu les faire disparaître… Cette argumentation amène des sous entendus défavorables, dont on se serait bien passés.

Leurs deux plaidoiries se fondent plutôt sur des éléments de juridiques, (l’avocat de Wiliam commence par préciser qu’il « ne confond pas l’ estrade/public d’un meeting avec le banc qu’il occupe »). L’avocate de J et R tente (quand même !) de poser des trucs qui puissent servir aux autres inculpés, en rajoutant dans sa plaidoirie qu’elle a vu dans le dossier le fameux schéma présenté par le procureur comme « schéma de fonctionnement d’une bombe » et qu’elle l’a interprété comme un bête schéma électrique (d’accord elle y connait rien mais bon). Pour le coup sa plaidoirie est plus citoyenne que celle de rippert, puisqu’elle va chercher du côté de la liberté de pensée, tout ça tout ça…. en plus de plaider la relaxe, l’avocat de Wiliam termine sa plaidoirie par le fait que « condamner Wiliam reviendrait à écrire (dans son casier judiciaire ?) « un soir de mai 2009 Zoé est morte et Wiliam dans les heures qui ont suivi porte une part de la responsabilité de cette mort » tout ça parce qu’un procureur est frustré qu’il n’ait pas réussi à constituer une association de malfaiteurs. […..] ». Ça veut dire quoi exactement ?

Il est fort probable que les auteurs de ces critiques soient renvoyés a une rigidité idéologique, et de fait il est admis pour un certain nombre de camarades, que face à un juge, l’important c’est de sauver sa peau. Certes. En les énonçant l’idée n’est pas de distinguer bonnes/mauvaises plaidoiries. Nous serions bien en peine de le faire, parce que si les avocats ont soulevé des points qui nous semblaient importants, on s’est de fait retrouvé en désaccord avec un certain nombre d’éléments de chaque plaidoirie, soit que politiquement on était en désaccord avec les arguments utilisés, soit parce qu’ils pouvaient desservir d’autres inculpés, soit que ça utilisait des registres émotionnels dégueulasses.

C’est de cette complexité-là qu’il s’agit, même si, de fait, certaines critiques touchent à nos yeux des points plus fondamentaux que d’autres. Certaines critiques pourraient être dépassées, d’autres moins. Il s’agit de contribuer, pourquoi pas, à affiner des réflexions quant aux modalités/degrés d’exigence et d’attentes qu’on peut avoir vis-à-vis des plaidoiries des avocat-es avec lesquels « on » choisit parfois de préparer des procès. Dans une situation où les chefs d’inculpation des unes et des autres sont liés, où les plaidoiries se succèdent dans un temps réduit et dans un même espace, les modalités de défense des unes et des autres ont évidemment de l’incidence sur la décision du juge. Oui il y a de la conscience en jeu, et quand on décide de jouer sur certains arguments c’est important de prendre en compte ce que ça peut impliquer pour les autres inculpés. Même si au fil des expériences, on se rend bien compte que c’est pas toujours si facile de faire comprendre aux avocats qu’il y a des arguments qu’on n’a pas envie d’utiliser de façon générale (le fait qu’on n’est pas en récidive, qu’on est bien inséré, qu’on s’est laissé attraper bien gentiment) ou tout simplement des arguments qui pourraient nous permettre d’être mis hors de cause en enfonçant d’autres inculpés… Tout ça fait penser que, les avocats peuvent avoir des idées et connaissances techniques utiles, mais que la décision d’utiliser tel ou tel argument, et pourquoi, doit venir ( et être assumée par) les personnes inculpées.

Pour finir, une des choses qui nous semblent marquantes, qui a traversé tout ce procès, et dont on aimerait pouvoir discuter plus souvent, c’est le rapport aux écrits « radicaux » , et la façon de les envisager comme « chauds », ou problématiques en soi. Question ou problématique qui va bien au delà des seules personnes inculpées vendredi pour destruction de preuves. On pense par exemple à la lutte contre le régime d’isolement spécial à l’intérieur des prisons espagnoles, le FIES (2000’s), dont un grand nombre de tracts/textes ont disparu quand une partie des compagnon-nes avaient des raisons de craindre des arrestations/perquisitions. On pense au refus de certains camarades ou connaissances de coller certaines affiches, de diffuser certains textes qu’ils ou elles considèrent comme « sensibles ». et donc de « s’associer publiquement » aux idées qu’elles énoncent (et qu’ils disent partager) parce qu’elles afficheraient un refus sans concession de cet existant de merde.

Quelles marges de manœuvre reste-t’il si nous commençons à intégrer l’idée que posséder, diffuser des écrits qui reprennent les idées que nous partageons, est déjà trop dangereux ou répréhensible ?
Qu’est ce que cela produit, en terme de différenciation et de dissociation, si ces pratiques se marginalisent, sous couvert de répression ?
Comment alors pouvons nous faire vivre nos idées, les rendre accessibles, les partager, si elles restent secrètes ?

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[Publié sur Indymedia Grenoble le 29 mai 2012]

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Entretien avec l’un des inculpés de Chambéry

Vendredi 25 mai, 4 personnes étaient jugées à Chambéry. L’une pour fabrication d’engin explosif et les trois autres pour dissimulation ou destruction de preuves. Le procureur a demandé 1 an de prison ferme pour le premier, 6 mois avec sursis et 5000 euros d’amendes pour les autres. A la sortie du procès, Jean raconte les différentes stratégies de défense, le rassemblement de soutien et d’autres choses…

Un entretien diffusé le vendredi 25 mai dans le Canut-Infos sur Radio Canut. [lien direct vers fichier mp3]

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[Diffusé sur Rebellyon.info le 26 mai 2012]

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