[Angers] le DAL enfin dégagé d’un squat

Angers. Rififi entre soutiens des squatteurs rue Audusson

Courrier de l’Ouest, 13 décembre 2011

Les demandeurs d’asile occupent toujours la maison située au 14 de la rue Audusson à Angers. Quatre d’entre-eux étaient assignés ce lundi au tribunal d’instance. Les juges diront le 22 décembre s’ils doivent être expulsés.
Samedi, l’association Droit au logement a été, en tout cas, expulsée par un groupe d’individus qui a décidé de « squatter le squat ».
Un drapeau noir, symbole anarchiste, flotte désormais sur la façade.

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À Angers, le squat est… squatté

Ouest-France, 12 décembre 2011

Des demandeurs d’asile avaient pris place, le 29 novembre, dans une maison bourgeoise, rue Audusson à Angers. Soutenus à la fois par Mgr Gaillot et le DAL (Droit au logement) 49.
« Depuis ce week-end, ce squat est squatté par des gens que nous n’arrivons pas à contrôler. Du coup, nous ne pouvons plus soutenir les demandeurs d’asile car nous ne pouvons plus assurer dignement leur sécurité », raconte Claude Charrier, responsable du Dal 49.
La Mutualité française Anjou-Mayenne a saisi ce lundi en référé le tribunal d’instance pour demander l’expulsion des demandeurs d’asile. Délibéré le 22 décembre.

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[repris des Brèves du désordre]

[Pour mémoire] sur le DAL :

« (…) L’idée de légaliser les squats n’est pas nouvelle et s’exprime par exemple depuis plusieurs années par la voix du DAL (Droit au Logement). Créé en octobre 1990 à partir des luttes de la place de la Réunion, en scissionnant une partie des familles pour s’allier avec les caritatifs comme Emmaüs et négocier avec l’Etat, le DAL s’est érigé en spécialiste de la cogestion de la misère. A partir de l’occupation de la rue du Dragon (Paris-6e), profitant de la campagne pour les élections présidentielles, s’appuyant sur des «personnalités» médiatiques, le DAL a fait du lobbying pour ressusciter une ordonnance de 1945 sur la réquisition de logements vides. Dès lors, il ne s’agira pas de réappropriations ou d’occupations mais simplement de réquisitions, appelant l’Etat à se saisir lui-même de ces immeubles, pour en confier ensuite la gestion -la surveillance- à des associations comme Emmaüs, le DAL, l’Armée du Salut, etc… Ainsi, il n’est jamais question pour lui de squatter des immeubles mais plutôt de faire des coups médiatiques afin de caser ses listes dans celles de l’Etat. De même, le Comité des Sans-Logis, issu d’une scission de la Coordination des Sans Abris fin 1993 avec l’aide du DAL (dont il fit officiellement partie jusqu’en 1996), précise bien qu’il n’est pas question de squatter, mais bien d’appliquer cette ordonnance, puis de travailler main dans la main avec l’Etat. Le DAL et le CDSL (qui s’occupe des célibataires), depuis plusieurs années, occupent donc le terrain de la légalité et de la cogestion, y compris pour les HLM (à Paris, le DAL trie parmi ses familles celles qui se verront attribuer un HLM par l’OPAC). (…) »

[Extrait d’un texte paru dans Cette Semaine n°80, mai/juin 2000]

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Nous sommes le 1 %

Nous vous avons vu. Nous vous avons entendu. Vous êtes désormais partout. Nous savons qui vous êtes. Vous êtes ces 99 % qui protestent contre les excès du capitalisme et les abus de l’Etat. Vous êtes les 99 % qui exigent des réformes électorales, des alternatives sociales, des subventions économiques et des mesures politiques. Vous êtes les 99 % angoissés de perdre votre futur, de n’être plus capables de vivre comme vous l’avez fait jusqu’à présent : un boulot, un revenu, un crédit pour la maison, une retraite. Vous laisser vivre, au minimum. Faire carrière, au maximum. Voilà ce que vous demandez. Vous ne voulez pas payer la « crise », vous voulez que tout redevienne comme avant. Que personne n’éteigne les écrans qui ont jour après jour asséché votre vie, la privant de tout sens et de toute émotion, la condamnant à la tristesse de la survie. Et tout cela, vous le demandez aux gouvernements et aux banques, afin que la démocratie soit : des gouvernants qui ne soient pas intéressés au pouvoir mais au bien commun, des banquiers qui ne soient pas intéressés au profit mais au bonheur des populations. Comme dans les contes, comme dans les films.

En attendant une fin heureuse qui tarde à venir, vous ne tolérez pas que certains ne partagent pas votre résignation hallucinante. De Madrid à Athènes, de Rome à Portland, vous êtes prêts à arrêter, dénoncer et bastonner ces enragés qui ne voient pas dans les institutions les garanties de la liberté mais les causes de la misère et de l’oppression. La vengeance, vous ne l’appréciez que dans les fictions au cinéma, mais une fois que le masque tombe, vous lui préférez la soumission. Face à une société aussi odieuse que putréfiée, vous vous battez pour une protestation civile, mesurée, éduquée. Une protestation qui reste toujours à votre hauteur : à genoux.

Maintenant, nous savons qui est ce 1 % que vous haïssez tant. Avec vos cordons, avec vos services d’ordre, avec vos délations, vous avez fait comprendre à tous qui est votre véritable ennemi. Ce n’est certainement pas la classe dirigeante, à laquelle vous vous adressez avec respect. C’est nous. Nous qui n’avons pas d’Etat à défendre ni à améliorer. Nous qui n’avons pas de marché à protéger ni à exploiter. Nous qui ne voulons ni exercer ni subir aucune autorité. Nous pour qui la vie n’est pas une carte d’adhésion à tamponner ou un compte courant à sauvegarder. Nous pour qui la crise n’est pas née avec les récentes spéculations boursières, ou suite à l’incapacité de ceux qui siègent actuellement au Parlement, mais en subissant cet ordre social sous tous ses aspects. Nous pour qui tous les jours sont précaires dans ce monde que nous n’avons pas voulu, dans lequel nous ne nous sommes jamais reconnus, et qui nous étouffe.

Nous ne voulons rien avoir à faire avec votre 99 %. Avec votre revendication d’un capitalisme modéré et d’un Etat correct. Avec votre allure politique majestueuse qui réduit le pouvoir et le privilège aux dimensions d’une carte de crédit. Avec votre camping urbain de boyscouts nostalgiques. Avec votre identification d’un adversaire -l’origine de l’« injustice »- toujours plus évanescent, immatériel et éloigné de nos coups. Avec vos bras toujours plus accueillants pour les politiciens, les industriels et les chiens de garde, et toujours plus vigoureux contre les rebelles. Avec vos actions toujours plus faibles qui ne sont devenues qu’un tiède intervalle entre deux statu quo. Non, nous ne voulons pas de vos réformes, de votre collaborationisme, de votre travail aliénant, de vos revendications sinistres* qui, à force d’être réchauffées, ne sont bonnes qu’à faire vomir.

Nous connaissons les véritables causes des souffrances que nous subissons : la soif de pouvoir, le culte de l’argent, mais aussi l’obéissance qu’ils exigent et obtiennent. Ces causes se perpétuent dans la vie quotidienne des êtres humains par des actions, des gestes, des rapports qui s’entremêlent à l’intérieur d’une société où nous nous sentons partout étrangers. Et ces causes -qui doivent être refusées, désertées, démolies- ont trouvé leur place au sein de votre mouvement. Nous ne nous sommes jamais sentis à l’aise dans le 99 % de notre vie moderne, passée à faire la queue pour mendier des miettes, et malgré cela vous vous acharnez à défendre ces 99 % du problème. Nous chercherons nos possibilités ailleurs. A travers les espoirs, les rêves et les actions qui ont mérité votre condamnation.

Quant à vous, continuez donc votre traversée de l’océan de l’indignation universelle. hissez vos voiles en passant les cordes à des bureaucrates et des flics. Partagez l’espace et l’air avec la lie qui a rendu la vie sur cette planète si invivable. Allez droit devant vers de nouvelles terres, les bottes encore pleines de la merde d’hier. Nous ne monterons pas dans votre bateau, au pire nous en descendrons. Nous resterons sur les radeaux que vous méprisez tant, parce que trop petits et trop légers. 
Mais faites attention. Un vaisseau qui vogue avec nos ennemis à bord est une occasion trop belle pour la laisser échapper. Vous riez ? Vous ne nous craignez pas, parce que nous n’avons pas la force pour vous donner l’abordage ? Vous nous avez mal compris. Votre or ne nous intéresse pas, nous ne voulons pas nous en emparer. Nous voulons vous envoyer par le fond avec toute votre cargaison de mort. Pour y réussir, pas besoin d’une flotte majestueuse, il suffit d’un brûlot**. Petit et léger.

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* NdT : jeu de mot entre « sinistre » et « de gôche ».

** NdT : jeu de mot qui fonctionne aussi dans la langue française. Un brûlot est à la fois un « navire chargé de produits incendiaires destinés à détruire les flottes ennemies » et un synonyme de « pamphlet virulent ».

Traduit de l’italien par Les Brèves du désordre, publié sur finimondo le 11 novembre 2011

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[Alès] Solidarité face à la Justice et au fichage

Le 25 octobre 2011, Jéjé s’est fait interpeller pour deal de shit.
Il a fait une garde-à-vue durant laquelle il a refusé le prélèvement
ADN. Il est convoqué ce 14 décembre à 9h, en CRPC (comparution sur
reconnaissance préalable de culpabilité) au tribunal d’Alès [1].

Au cours de la garde-à-vue, en plus d’inculper Jéjé pour
insoumission au fichage et commerce illégal, les flics ont mené
plusieurs interrogatoires portant sur ses relations et idées
politiques (mouvement contre la réforme des retraites, venue du
président à Alès, rapport avec des organisations politiques, avis
sur la tenue d’un G20 à Nice, etc…). Questions auxquelles il a
refusé de répondre. On nous veut exploités et dociles, isolés et
fragiles face à la loi de l’économie et du capital. Il s’agit pour
les flics d’identifier et de surveiller les formes de résistance à
la misère et de critique du système. Ainsi, c’est une condition
sociale et ses velléités de s’en sortir qui sont criminalisées.

Père célibataire de deux enfants, précaire quelconque, Jéjé se
démerde comme il peut pour assurer le quotidien. Dans un monde où
l’argent et la propriété font tout, la justice condamne des milliers
de Jéjé qui se sont fait prendre à vouloir s’en sortir un peu moins
mal. Le banc des prévenus est rempli de dépossédés, d’enragés
rongeant leur frein, que la justice prétend remettre dans le droit
chemin par ses sermons hypocrites et ses condamnations vengeresses.
Une justice de classe donc, qui, quotidiennement, condamne en
fonction de critères socio-économiques, en renvoyant l’accusé à ses
« erreurs » personnelles. Le prévenu serait le seul « coupable » de
la situation, pour dégager toute responsabilité à la société. En
individualisant ainsi son exercice, la justice cherche aussi à nous
priver de nos moyens de nous défendre, en ôtant le caractère
politique de la légalité et du crime. Chaque affaire est le
miroir des inégalités et de la misère sociale.

La logique de contrôle et de répression se développe de manière
exponentielle, sous l’impulsion d’une logique sécuritaire et grâce à
la massification de l’informatique : en 2010, près de 60 fichiers de
police et gendarmerie étaient recensés, auxquels il faut y ajouter
plusieurs dizaines, gérés par les diverses administrations et ceux
des entreprises privées (sites internet, grande distribution,
officines de sécurité…). Cette frénésie du classement permet à
l’État, grand gestionnaire des ressources humaines, de manager et de
contrôler la population, de la masse à l’individu. Elle engendre la
banalisation du fichage afin de gérer le prolétariat dans ses
déplacements et ses loisirs : d’optimiser son exploitation. Avec
l’aide de ses conseillers, sociologues et autres spécialistes des
sciences humaines, il isole des catégories sociales, qu’il surveille
et réprime spécifiquement : « clandestins », « gens du voyage »,
« bandes de jeunes », « islamistes », « anarcho-autonomes », etc…

L’État déploie un arsenal répressif pour distiller la peur, pour
prévenir et endiguer les révoltes et insoumissions. Il doit
préserver les valeurs essentielles qui fondent et entretiennent les
inégalités sociales : respect de l’autorité, propriété privée,
travail, morale. Il doit défendre sa classe et ses valeurs,
aujourd’hui plus crûment que dans un passé récent, face aux flots de
pauvres, d’ici ou d’ailleurs, produits par la machine capitaliste.
Ce ne sont pas les dérives d’un système qui glisserait vers un autre
(fasciste ou totalitaire), c’est l’État et son régime démocratique
qui adapte sa gestion de la population aux nécessités économiques.

Les sciences (ADN, biométrie, vidéo-surveillance…) apportent dans
le domaine répressif une contribution notable [2] . La justice, pour
condamner, se drape d’une prétendue objectivité. Elle utilise tout
un tas d’experts (psychiatres, graphologues, experts en
balistique…) pour établir la « preuve formelle ». C’est une cour
de spécialistes, tous renfermés dans leurs domaines désincarnés, qui
imposent leurs sentences aux accusés. L’utilisation des profils ADN
s’intègre en plein dans cette mascarade. Le refus d’être enregistré
dans le FNAEG est un acte d’insubordination et de protection face à
la logique du fichage génétique.

Des solidarités sont à construire et à multiplier pour sortir de
l’isolement et du cloisonnement dans lequel le système cherche à nous
maintenir. Rencontrons-nous pour discuter et affirmer notre solidarité,
face à cette justice de classe.

Rassemblement le 14 décembre 2011, à partir de 9h, devant le palais de justice d’Alès.

[1] Pour voir des informations sur les procédures et nos droits, il
existe un traité de self-défense juridique « Face à la Police / Face à
la Justice », consultable sur http://www.guidejuridique.net/

[2] Pour plus d’informations sur l’ADN, on trouvera les trois brochures
« L’apparence de la certitude, L’ADN comme « preuve » scientifique et
judiciaire », « Du sang, de la chique et du mollard ! » et « « Ouvrez
la bouche », dit le policier », sur le site http://adn.internetdown.org/.

Collectif contre la répression Kalimero sous le soleil :
kalimerosouslesoleil [a] no-log.org

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« Une question de classe » – Alfredo Bonanno

Contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, la classe n’est pas un concept marxiste.

Bien que nous rejetions les allégations marxistes sur le rôle historique de la classe ouvrière industrielle comme supérieure à tous les autres exploités, il est évident que la société est encore divisée en classes antagonistes.

Les termes de cette division se transforment avec la restructuration du capital. Il est important de reconnaître celà afin d’adresser nos attaques vers les bonnes cibles dans la lutte.

Beaucoup d’anarchistes croient que l’idée de «classe» est un concept marxiste, et par conséquent ne s’y intéressent pas, et essaient de travailler sur d’autres manières de comptabiliser les divisions sociales.

Mais ces divisions existent clairement. Les conflits et la souffrance dominent la réalité moderne. Les masses qui soutiennent les profiteurs, et même leurs laquais survivent avec peine.

Il est donc nécessaire de tracer les contours des groupes sociaux où des individus partagent la même situation économique, politique, culturelle et sociale; peu importe la difficulté que cela représente.

Il est vrai que le terme «classe» a été dominé par la mystification marxiste pendant les quarante dernières années. Et ce n’est pas tant dans l’identification que Marx fait des classes, que par son affirmation selon laquelle la classe ouvrière industrielle est historiquement destinée à entraîner non seulement sa propre libération, mais aussi celle de l’ensemble de l’humanité, à travers la direction du parti qui prétend la représenter.

Tout anarchiste peut voir ici combien cette notion de classe est absurde et erronée. Mais nous devons nous rappeler que celà n’a pas tant à voir avec le concept de classe, qu’avec le rôle déterministe et messianique qui a été imposé à la classe ouvrière industrielle.

Nous pensons que le concept de classe est non seulement valable, mais nécessaire. Il est un instrument pour nous guider à travers le flux des divers aspects de la réalité sociale. Mais que nous ne sommes pas intéressés par les revendications mythiques sur le destin de la classe ouvrière industrielle.

Une chose que nous pouvons dire avec certitude est que les structures productives qui définissaient les divisions de classe dans le passé récent sont aujourd’hui en profonde mutation. Ce qui est également certain, c’est que bien que différent à bien des égards, un conflit tout aussi amer se reproduit aujourd’hui. Le problème est de voir comment cela se passe. A quoi faisons-nous face aujourd’hui ? Qu’est-ce qui marque la frontière entre la partie dominante de l’humanité et le reste?

Cette question est si importante qu’elle met la nécessité d’étudier les strates intermédiaires en deuxième place à l’heure actuelle. De tout aussi peu d’importance – pour le moment – est la nécessité d’envisager une répartition en trois classes ou plus. Ce qui nous intéresse aujourd’hui est la disparition progressive des divisions de classe traditionnelles et l’émergence d’une nouvelle.
Il est clair qu’un tel argument a besoin de plus d’espace que ne nous pouvons lui en consacrer ici, mais nous ferons de notre mieux. La division de classe était jadis basée sur l’idée d’un «manque».
Il y avait quelque chose qui était considéré comme le «bien commun» qui a été divisée en deux parties inégales. La classe au pouvoir a pris possession de la plus grande partie de ce bien (communément connu comme la richesse), et de ce profit injuste a tiré les moyens de poursuivre l’exploitation et la domination. Ce sont, en premier lieu, les moyens culturels et idéologiques sur lesquels une échelle de valeurs a été fondée et qui condamnait la masse expropriée à ce qui semblait une situation irréversible.

En fait, les profondes contradictions au sein du système lui-même produisent des effets aussi radicaux en son sein que la lutte contre ses propres de domination. De récurrents problèmes sociaux ont été résolus par l’amélioration des conditions de travail.

La situation est devenu si insupportable pour le capital qu’il a dû renforcer ses structures, en augmentant la collaboration entre les États : mais c’est la technologie de pointe qui a eu un impact décisif en rendant la restructuration de la production possible.

Nous nous dirigeons maintenant vers une situation radicalement différente. La question du «manque» est de plus en plus floue, tandis que la question de la «possession» se dessine. La différence de classe n’est plus seulement créée par le fait que quelqu’un ne possède pas « autant » que l’autre, mais par le fait – unique dans l’histoire de l’humanité – qu’une partie possède «quelque chose» que l’autre n’a pas.

Pour mieux comprendre cela, nous devons nous rappeler que dans le passé la classe des exploité-e-s a toujours « possédé » quelque chose, même si ce n’était seulement que leur «force de travail», c’est à dire leur capacité à produire. Ils et elles ont toujours été obligé-e-s de la vendre, c’est vrai, et souvent à un prix très bas, mais de l’autre côté en avait toujours besoin.
La négociation pouvait même atteindre ce point où ces malheureux vendeurs de leur force de travail n’arrivaient plus à joindre les deux bouts, mais personne ne pouvait nier que la classe ouvrière avait une «possession» qui faisait partie de la même échelle de valeurs que celle de la classe dominante. Dans le passé, les exploiteurs et les exploité-e-s se faisaient face (également au sein de la gamme considérable de stratifications de classes) sur la base d’une «possession» qui a été commune aux deux, mais leur appartenait de manière inégale. Maintenant un côté possède quelque chose que l’autre n’a pas, et n’aura jamais.

Cette «chose», c’est la technologie : la gestion technologique de la domination, la construction d’une «langage» exclusif appartenant à une classe «d’inclus». La classe dominante s’entoure aujourd’hui d’une muraille qui est beaucoup plus élevée que celle d’autrefois, qui consistait en la richesse matérielle et était défendu par des gardes du corps et des coffres-forts. Ce mur sera toujours une séparation radicale, aussi nette qu’incompréhensible – à court terme – pour ceux et celles qui ne se trouvent pas dans le processus d’inclusion. Le reste, les «exclus», deviennent une classe de « bénéficiaires » externes, capables d’utiliser seulement la technologie de manière secondaire et parfaitement instrumentale au projet de domination.

La partie des « exclu-e-s » de l’humanité n’est pas encore en mesure, au moins pour un temps très long à venir, de réaliser ce qui lui a été volé, parce que c’est une production qui n’appartient plus à la même échelle de valeurs. En construisant cette nouvelle séparation, la dernière espère-t-elle, la classe dominante a également construit un nouveau code moral qui n’appartient plus à la même échelle de valeurs, une sorte de code moral qu’elle n’a plus l’intention de partager avec les autres, avec ceux et celles qui appartiennent au monde des exclu-e-s. Autrefois, le principe du talon d’Achille était précisément ce code moral. Il était utile de plusieurs façons en vue d’assurer un meilleur contrôle, mais il a souvent abouti à ce que les exploiteurs sentent le souffle chaud de leurs partisans sur leurs cous.

Ainsi, cette nouvelle situation qui est sur le point de s’achever est la construction de nouvelles structures de classes, et non l’abolition du concept de classe. Ce n’est pas une question de terminologie, mais une nécessité opérationnelle. A l’heure actuelle, les concepts de classe et ceux relatifs aux «conflits de classe» semblent tout à fait adéquates pour indiquer les processus de la structuration sociale et comment celle-ci fonctionne. De la même manière, il est toujours possible d’utiliser le concept de «conscience de classe» face à la difficulté croissante que les «exclus» ont à considérer leur propre condition d’exclusion.

Chaque stratégie révolutionnaire que nous pouvons imaginer pour la résistance contre le processus de restructuration en cours devrait garder à l’esprit les modifications qui sont en cours et, dans certaines limites, la stratification au sein des classes elles-mêmes. Peut-être dans cette phase précoce les marges de la classe incluse (l’ennemi de classe) ne sont pas faciles à définir. Nous aurons donc à adresser nos attaques vers des objectifs qui sont les plus évidents. Mais ce n’est qu’une question de documentation et d’analyse.

Ce qui est plus important à ce stade est de montrer que les discussions sur la terminologie ne vont pas résoudre le problème qui consiste à trouver l’ennemi et à le démasquer. Un acharnement à ce sujet masque simplement une incapacité à agir.

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Notes: D’abord publié en anglais dans le numéro 5 du journal « Insurrection », en 1988.
Source: Récupéré le 7 avril 2011 à partir de http://pantagruel-provocazione.blogspot.com/2010/07/question-of-class.html

Traduit de l’anglais par Le Cri Du Dodo.

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Liberté pour les inculpé-e-s du 15 novembre 2011 à Toulouse

Annonce sonore pour la semaine de solidarité du 10 au 17 décembre 2011.

Infos et contact :

nonalepm (a) riseup.net

http://pourlaliberte.noblogs.org/

Soutien financier pour les frais de justice et la cantine en prison : envoyez vos chèques à l’ordre de « Maria », CAJ c/o Canal Sud, 40 rue Alfred Duméril, 31400 Toulouse

[repris depuis http://sonsenluttes.net/spip.php?article381]
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[Pour mémoire] Contribution aux discussions sur la répression antiterroriste

 

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Paris : nouveaux coups de pression suite à un tract

Nous apprenons que deux procédures ont été ouvertes et confiées à la BRPD (Brigade de Répression de la Délinquance à la Personne, dans le XIIIe arr.) afin de trouver les auteurs du tract Correspondants de nuit : des agents de proximité de la guerre aux pauvres diffusé depuis octobre 2010. Des menaces avaient déjà été proférées à ce sujet. Cette fois-ci, c’est le site « Retour à Belleville » (qui n’est plus mis à jour) qui est visé pour avoir repris le tract publié à l’origine sur Indymédia.

Après enquête, les flics ont décidé de convoquer le père d’un compagnon déjà mis en examen dans d’autres affaires, sous prétexte que celui-ci aurait transmis les identifiants wifi public Neuf à son fils, que ce dernier aurait utilisé pour publier le tract sur le blog.

Bien sûr, il s’agit d’emmerder le compagnon ; en s’attaquant à ses proches, les flics contournent ainsi son refus de collaborer à leur travail.

Le père du compagnon avait d’abord été convoqué par courrier. Puis les flics sont venus le déposer eux-mêmes dans la boite aux lettres, avant de passer aux coups de fil répétés, et en dernière instance, aux recommandés (rappelons qu’il n’est pas obligatoire d’aller retirer un recommandé à la poste).

Il a finit par se rendre à la convocation. Les flics lui ont posé un tas de questions sur ses connaissances de l’anarchisme, s’il se rendait sur le marché de Belleville, s’il y distribuait des tracts, etc…Puis ils lui ont fait lire le tract avant de lui demander son avis. Ils ont ensuite posé plusieurs questions sur son fils, auxquelles il n’a pas répondu. Suite à quoi les flics ont commencé les menaces : perquisitions à l’improviste chez ses amis (celui-ci ayant refusé de dire nominément qui utilise son ordinateur) et saisie du matériel informatique (« qu’ils ne sont pas prêts de revoir »), puis de s’attaquer au fils et à ses compagnons « déjà sur la sellette » dans d’autres affaires.

Depuis les flics ont appelé le compagnon sur son téléphone portable (en appel masqué), laissant un message : « Police judiciaire, convocation… »

Nous avons appris que la plainte venait nominativement des quatre correspondants de nuit qui apparaissent dans le tract et que l’accusation est « diffamation publique non suivie d’actes », du moins pour celle que nous connaissons.

Nous ne sommes ni paranos, ni apeurés, ni indignés par ces manoeuvres politico-policières, finalement très banales. Il s’agit là d’une tentative d’isoler un compagnon, en essayant de faire le vide autour de lui, au sujet d’un tract qui à l’époque fut massivement diffusé, y compris dans la rue, par voie d’affichage et de tractage.

Cela ne doit pas empêcher tous ceux qui en partagent le contenu de continuer – ou de commencer – à diffuser ce tract toujours d’actualité, et de continuer à démasquer et à saboter le travail des correspondants de nuit, et de tous les agents de proximité de la guerre aux pauvres, chacun selon les moyens qui lui sembleront pertinents.

Quelques un-es des auteurs du tract

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Trouvé sur Indymedia Nantes le 8 décembre 2011

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[Nantes] Solidarité avec les inculpé-e-s de Poitiers

« Poitiers, Nantes, à bas leurs nécropoles »

Le 5 novembre à Poitiers, une maison est occupée pour lutter contre VInci et l’aménagement du « coeur d’agglo ».Cinq personnes sont ciblées parmi une cinquantaine arrêtées, et passent en procès aujourd’hui, après un mois de contrôle judiciaire.

En soutien, des banderoles ont été posées sur les ponts du périph de Nantes:
« Solidarité avec les inculpées de Poitiers »
« Poitiers, Nantes, à bas leurs nécropoles »
« Vinci dégage, résistance et sabotage »
« En Russie Vinci assassine »
« Au Niger, à Nantes… et partout Vinci détruit nos vies »
« Crève Vinci, PS et leur monde »
« stopvinci.noblogs.org »

La répression des luttes ne nous surprend pas, elle est l’arme de l’Etat: isoler quelques individus pour affaiblir des résistances collectives. Face à cela, au contraire, nous créons et renforçons des liens avec celleux qui s’opposent à ce monde de merde.
A Nantes jeudi dernier, comme à Toulouse le 15 novembre, les mercenaires de l’Etat sont venus en force arrêter des gens chex elleux, certaines sont enfermées depuis, d’autres attendent leur procès.
Que ce soit contre la PJJ qui gère les Etablissements Pénitentiaires pour Mineurs, ou contre VInci qui en construit (entre autres merdes), nous sommes et serons solidaires!

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Publié sur Indymedia Nantes le 8 décembre 2011

 

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Paris : Dates de procès suite à une instruction antiterroriste (Fumigènes, Vierzon, Dépanneuse, SNCF)

Après plus de trois ans d’enquête, le juge Brunaud a clos son instruction à la fin du mois d’août 2011 et a décidé de renvoyer six camarades devant le tribunal correctionnel antiterroriste. La date définitive du procès sera fixée lors de l’audiencement le 13 février prochain au TGI de Paris. Des dates ont déjà été réservées, le procès devrait donc probablement se dérouler durant cinq après-midi les 14, 15, 16, 21 et 22 mai 2012 devant la 10ème chambre du Tribunal correctionnel de Paris.

Quatre affaires ont été jointes durant cette instruction et seront jugées ensemble sous le prétexte d’une même association de malfaiteurs dans un but terroriste :
L’arrestation de trois camarades avec un fumigène et des clous tordus en janvier 2008 peu avant une manifestation se rendant au centre de rétention de Vincennes
L’arrestation de deux camarades au péage de Vierzon quelques jours plus tard
L’accusation de tentative d’incendie d’une dépanneuse de la police nationale en mai 2007 au moment de l’élection de Sarkozy, sur la base de relevés ADN
L’accusation de tentative d’incendie d’une armoire électrique de la SNCF en mars 2006, au moment de la lutte contre le CPE, également sur la base de relevés ADN

Six camarades – Ivan, Bruno, Damien, F. (Farid), I. (Isa), J. (Juan) – seront jugés, ils ont déjà fait de cinq à treize mois de détention provisoire. Ils sont toujours sous contrôle judiciaire depuis leur sortie de prison. Ce contrôle leur interdit de rentrer en contact entre eux pour la plupart et de sortir du territoire français sans autorisation. Ils doivent également pointer une fois par mois au commissariat ou au tribunal et être suivis par un contrôleur judiciaire (tous les mois ou tous les trois mois) pour notamment justifier de leurs activités professionnelles. Les critères du contrôle judiciaire évoluent suite aux demandes répétées des mis en examen.

Les six camarades sont accusés de :
Participation à un groupement formé en vue de la préparation d’actes de terrorisme (pour les six)
Fabrication d’engins explosif ou incendiaire (pour trois)
Tentative (ou complicité de tentative) de dégradation ou de destruction d’un bien appartenant à autrui (pour trois)
Détention et transport de produits incendiaires ou explosifs (pour quatre)
Refus de se soumettre au prélèvement ADN (pour trois)
Refus de soumettre aux prises d’empreintes digitales (pour trois)

A noter que les cinq derniers délits sont tous « en lien avec une entreprise terroriste ». Ce ne sont pas ici les termes tout à fait exacts de la justice, les motifs du renvoi de le tribunal correctionnel font dix pages, nous essaierons de les transmettre plus en détail dans les semaines qui viennent.

Pour rappel, l’ensemble de ces affaires et des actions de solidarité qu’elles ont suscitées est détaillé sur le site de « Mauvaises Intentions » :

http://infokiosques.net/mauvaises_intentions

Contact : solidaritesinculpes [a] riseup.net

Publié dans contrôle social, contrôle policier, general, guerre sociale, mauvaises intentions, solidarité | Commentaires fermés sur Paris : Dates de procès suite à une instruction antiterroriste (Fumigènes, Vierzon, Dépanneuse, SNCF)

Une vie sans Etat ni argent ni autorité au-dessus de nos têtes?

[extrait de Lucioles n°5 – novembre/décembre 2011]

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Cela fait un an que nous diffusons ce bulletin dans les rues de Belleville, à la sortie du métro, dans les bars, librairies, laveries, à chacun sa manière de se le procurer. Pourtant, ce sont toujours les mêmes questions qui nous sont posées. C’est quoi l’anarchie ? Comment vivre sans argent, sans Etat, sans prisons, concrètement. Au préalable, nous répétons toujours que nous ne sommes pas des politiciens et que nous ne faisons pas de la politique. Tout simplement, nous ne prétendons pas posséder de recette, de programme ou de solution livrée clé en main à la misère de ce monde. Nous ne souhaitons pas que les gens nous suivent, aussi vrai que nous ne voulons suivre ni obéir à personne, nous ne sommes pas des militants. Il appartient à chacun de trouver sa propre façon de lutter, de porter des coups à ceux qui nous pourrissent la vie, aucune nécessité de rendre des comptes à quiconque. Nous ne voulons pas d’une énième organisation inutile dont le seul but serait de se perpétuer dans de vieilles formes malgré l’évolution rapide du monde, nous sommes des individus, pas des soldats. Mais si nous n’avons pas de solution, alors pourquoi lutter ? Parce que nous faisons le pari qu’un monde libéré au maximum de la domination est possible, et si nous nous trompons, alors tant pis, au moins nous n’aurons jamais trahi nos désirs profonds de liberté, au moins, nous avons rêvé, mêmes éveillés, alors que tant d’autres se sont noyés dans la misère et l’isolement. Dans ce numéro, comme dans les numéros précédents et futurs, nous parlerons de liberté. Qu’il s’agisse de la liberté en général, de divers épisodes de liberté ou d’entraves à celle-ci. Alors bonne lecture.

Nous nous opposons par tous les moyens qui nous semblent justes, à tout ce qui se place sur le chemin de notre liberté. Pour cette raison, nous voulons en finir avec l’Etat, avec tous les États. Nous voulons en finir avec l’économie et nous débarrasser de toute forme d’autorité, qu’elle soit institutionnelle, formelle ou informelle, physique, morale ou mentale. Bien sûr, il ne s’agit pas d’un jeu consistant à pisser plus loin que tout le monde : abolir toute forme d’autorité, dans nos bouches, ne signifie pas abolir l’autorité de soi sur soi-même. Entendre par là, notre capacité à contrôler avec justesse nos sentiments et nos passions au gré des événements, à faire preuve de discernement dans nos façons de s’associer librement avec nos semblables.

Ce monde que nous portons dans nos cœurs est incompatible avec celui-ci. Et toutes les tentatives du passé ont montré qu’il ne servait à rien d’essayer d’expérimenter la liberté totale dans son coin sans avoir préalablement détruit l’autorité. On s’amuse, on s’amuse, mais un jour ou l’autre, un propriétaire viendra réclamer ses terres, un flic ou un gendarme viendra défoncer la porte, la société se venge toujours de ses marges. Pour ces quelques raisons nous voulons détruire la société, par l’intelligence si possible, et par la force si nécessaire. Tout ce qui affaiblit le pouvoir, le déstabilise, l’abolit et qui ne perd pas de vue le monde débarrassé de toute domination que nous portons dans nos cœurs, tout cela est bon, c’est de cela que se nourrit ce journal.

Oui, nous sommes révolutionnaires, et nous n’avons pas peur de le dire. Il n’est question d’aucune clandestinité, nous sommes prompt à porter nos idées avec nous dans la rue, à faire nos propositions de rupture avec l’existant à quiconque veut bien prendre son temps pour discuter. La police a beau nous harceler, nous incarcérer, nous tuer, nous sommes des millions à travers le monde à combattre l’ordre, de mille manières différentes, anarchistes ou non, révoltés avant tout.

Notre but n’est pas de faire peur, il n’est pas non plus de se donner une bonne image ni d’être respectables, notre but est la transformation du monde et des rapports qui régissent les relations entre humains. Nous voulons uniquement vivre nos existences libérées de toute contrainte extérieure, des chefs, des flics, des juges, des profs, des citoyens et de toutes les autres canailles. Peut être bien que faire peur à nos ennemis ne nous dérange pas plus que ça, certes, mais cela n’est en aucun cas un but profond de notre action.

Avec ce journal, nous essayons modestement de contribuer à la pollinisation de la révolte contre l’existant, à la discussion et à la diffusion de nos idées, souvent appelées « anarchistes ». Et si nous souhaitons imposer notre liberté à quiconque aurait pour volonté de l’entraver, nous ne souhaitons pas particulièrement imposer l’anarchie à quiconque n’en voudrait pas. De toute manière, l’anarchie est affaire de relations consenties, de libre-association des individus et d’entraide, autant de choses qui nécessitent la réciprocité et la volonté de mettre la main à la patte sans y être forcé par une autorité quelconque, fut-elle anarchiste.

Lorsque les médias nous décrivent telle une horde de barbares assoiffés de sang, comme des terroristes, ils ne font qu’entretenir un fantasme qui fait bien leur affaire. On pourra alors attribuer des pratiques répandues et vieilles comme le monde à de petits groupes d’agitateurs iconoclastes reconnus afin de pouvoir les isoler, et d’une pierre deux coups, de pouvoir bannir ces pratiques en les qualifiant de criminelles, hors-la-loi ou terroriste. Nous parlons bien sur de toutes les formes de rétributions sociales vieilles comme la domination: L’attaque, la vengeance sociale, le sabotage, l’incendie, l’émeute ou le scandale en font partie. Les insurrections ne sont pas menées par quelques bandes d’anarchistes organisés en tant que tel, mais par des foules de révoltés. A travers l’histoire, les anarchistes ont toujours participé aux révoltes et aux insurrections de leur temps, mais ils n’ont jamais cherché à en prendre la tête, ils ont toujours lutté à l’intérieur comme à l’extérieur de toute révolution afin de se débarrasser des chefs. Nous ne sommes pas des adorateurs de la violence, celle-ci n’est qu’un moyen adapté pour parvenir à nos fins, elle est nécessaire mais elle n’est en rien une fin en soi.

Si tu n’es pas prêt à remettre en question cette vie de merde, alors nul besoin que ce journal n’effleure même que ton groin. Si tu es prêt à mettre ta vie en jeu pour protéger la domination, alors tu es un problème et nous devrons nous combattre jusqu’à ce que l’un de nous cède, et nous ne cédons pas. Si par contre, tu es prêt à te mettre en jeu pour en finir avec ce triste monde fétide, et bien alors, peut être bien que ce journal t’intéressa parce qu’il y est question de rage, de liberté, de la guerre sociale en cours depuis toujours. Il est le produit de la libre-association de quelques anarchistes dans le but ponctuel de sa conception et de sa diffusion. Il s’agit d’emmerder nos ennemis, de pointer du doigt les responsables de notre oppression et de donner de la force à nos amis, amants, compagnons, frères et sœur de lutte qui se sentent isolés dans cette vallée de larmes.

Voilà, peut être comprends-tu mieux maintenant ce que nous voulons faire avec ce bout de papier. Qui sait, peut être pouvons nous nous entendre pour conspirer contre ce monde, quitte à jeter quelques coups d’épée dans le vent comme Don Quichotte, quitte à en finir une bonne fois pour toute avec le pouvoir.

On ne sait jamais.

« Que le poète transforme sa lyre en poignard !
Que le philosophe transforme sa sonde en bombe !
Que le pêcheur transforme sa rame en une formidable hache.
Que le mineur sorte des antres étouffantes des mines obscures armé de son fer brillant.
Que le paysan transforme sa bêche féconde en une lance guerrière.
Que l’ouvrier transforme son marteau en faux et en haches.
Et en avant, en avant, en avant ! »
 
Renzo Novatore, 1921
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