Mexique : mise à jour sur l’enlèvement du compagnon Gustavo Rodríguez

[Repris intégralement des Brèves du désordre, le 2 janvier 2014]


URGENT ! Le compagnon Gustavo Rodríguez a disparu

Compagnon-nes nous allons être le plus brefs et objectifs possibles.

Depuis la soirée du 29 Décembre, dernier jour des Rencontres informelles-Symposium anarchiste international, et jusqu’à aujourd’hui, le compagnon anarchiste Gustavo Rodríguez Romero a disparu.

Le 29, vers 19h30, Gustavo est parti seul de l’auditorium Che Guevara pour se diriger vers le métro Copilco et retrouver sa compagne pour rentrer chez eux. Mais cela n’a pas eu lieu, car Gustavo n’est jamais arrivé.

Cinq minutes après le départ de Gustavo, une compagnonne restée aux Rencontres a reçu un appel téléphonique du portable de Gustavo, mais n’a entendu que des sons bizarres et après quelques secondes l’appel a été coupé. Face à ces faits étranges, elle a tenté de rappeler à plusieurs reprises mais sans obtenir de réponse et s’est résolue à attendre, comme ils l’avaient décidé en commun.

Hier après-midi, le 30 Décembre, la même compagnonne a reçu un message de la compagne de Gustavo lui demandant ou il était, car il n’était pas rentré chez lui. Or, il prévient toujours lorsque cela se produit et ne laisse jamais sans nouvelles. En effet, Gustavo ne blague pas avec ces choses là et n’est pas non plus du genre à partir comme ça faire la nouba.

Jusqu’à ce matin, 31 décembre, nous n’avons pu le localiser nulle part, ni dans les hôpitaux, ni dans les commissariats de police, ni dans le centre de détention pour étrangers, car il est né à Cuba et a un passeport étasunien. Nous ne l’avons trouvé nulle part. La PGR (Parquet Général de la République) a dit qu’ils ne retiennent aucune personne de ce nom.

Nous voulons rappeler que cela se produit dans un climat de harcèlement de la part du GDF, qui a commencé lorsque divers collectifs anti autoritaires, anarchistes et libertaires en affinité ont repris le célèbre Auditorium Che Guevara dans la Faculté de Philosophie et de Lettres de l’UNAM ; il s’est encore intensifié quand a débuté le Symposium International Anarchiste / Rencontres informelles anarchistes. De là et jusqu’au jour d’aujourd’hui les compagnon-nes entrant et sortant de auditorium ont été harcelé-es, pris-es en photo, suivi-es à pied et en voiture ; ils ont aussi envoyé des « journalistes » camouflés pour poser des questions compromettantes, etc.

Gustavo Rodríguez est un compagnon anarchiste d’environ 54 ans qui a écrit de nombreux textes sur la politique sociale, pour la plupart d’une perspective anarchiste et qui a fait d’importantes contributions au développement de la perspective anarchiste insurrectionnelle. Son dernier travail a consisté à compiler des textes pour l’édition du livre «  Que se ilumine la noche  » Génesis, desarrollo y auge de la Tendencia informal anarquista en México, edité récemment par les éditions Internacional Negra. Il était venu au Symposium Informel Anarchiste pour faire un exposé sur l’anarchisme, insurrection et la guerre sociale.

Nous voulons aussi mentionner que le compagnon Gustavo a aussi déjà fait l’objet de représailles verbales et écrites en réponse à ses critiques envers des groupes gauchistes, qui sont allés jusqu’à tenter de le désigner comme le “leader” ou le chef de groupes d’action anarchiste agissant sur le territoire mexicain.

Nous exigeons que le compagnon Gustavo Rodríguez Romero soit présenté en vie !
Nous désignons comme principal responsable de cette disparition forcée le Gouvernement du District Fédéral, étant donné le climat de harcèlement et de répression contre les anarchistes qui s’est installé au cours des derniers mois !
Nous invitons à se solidariser , car la solidarité est notre arme !

Cruz Negra Anarquista México

[Traduit de l’espagnol de contrainfo, 1 January 2014]


Mexico : la police séquestre, interroge, tabasse et déporte le compagnon Gustavo Rodríguez

Il y a quelques heures, le compagnon Gustavo a donné signe de vie, après avoir disparu depuis le 29 décembre dernier. Il nous a raconté brièvement qu’il a été arrêté par des agents fédéraux et qu’il a été soumis à de forts interrogatoires. Gustavo explique qu’il a été frappé et qu’après quelques heures, comme ils ne pouvaient l’accuser de rien, ils l’ont déporté vers les Etats-Unis.

Cette expulsion fait partie d’une politique anti anarchiste menée par le gouvernement mexicain depuis des mois. C’est pourquoi nous appelons à être attentifs-ves à ce qui pourrait se passer les temps prochains.

Nous remercions toutes celles et ceux qui ont diffusé le communiqué sur la disparition de Gustavo, et nous demandons à ce que circule cette nouvelle information.

Solidarité avec Gustavo !
Liberté pour toutes et tous !

Cruz Negra Anarquista

[Traduit de l’espagnol de contrainfo, 1 January 2014]


Une semaine plus tôt, A. Bonanno était lui aussi expulsé du Mexique et renvoyé en Argentine : voilà le récit du même Gustavo Rodríguez

Bonanno de nouveau expulsé, cette fois du Mexique

Les pratiques d’action directe sont maintenant le corollaire de ce bagage conceptuel rajeuni. Face à face avec l’ennemi, sans médiations : voilà la devise et l’emblème d’une pratique d’intention, d’orientation et de possibilité anarchiste”. Rafael Spósito (Daniel Barret)

Il y a exactement quatre ans, trois mois et 22 jours, j’ai reçu l’appel d’un grand compagnon pour m’informer d’une triste nouvelle : ce cher Alfredo María Bonanno avait été arrêté suite à une expropriation ratée dans la ville de Trikala, au nord de la Grèce. Aujourd’hui j’ai eu une brève discussion au téléphone avec le compa Alfredo qui a produit en moi la même indignation et impuissance face à cet appel tragique. Au milieu des cris et des expressions pompeuses des oppresseurs qui lui ordonnaient d’éteindre le téléphone, il m’a informé que les autorités migratoires l’avaient empêché de rentrer sur le territoire dominé par l’État mexicain, le déclarant comme “persona non grata” pour sa soi-disant “dangerosité” et ses “antécédents pénaux”, ce pour quoi ils l’ont déporté en Argentine. Malgré le peu de temps que nous avons parlé j’ai ressenti à travers ses paroles brèves la force d’un irréductible. La première chose que je lui demandé c’est comment allait sa santé, et il m’a répondu que ça allait. Furieux, la seule chose que j’ai trouvé à lui dire c’est que je regrettais beaucoup la décision de ces salopards et il m’a répondu optimiste, avec la sérénité et la condition réflexive qui le caractérise : “c’est logique que ça nous arrive”. Oui, avec ces mots simples et ce commentaire concis, Alfredo résumait la réalité du réveil anarchiste du XXI°siècle et la répression logique dont nous souffrons. Sans aucun doute nous sommes devenus le pire cauchemar de la domination. Aujourd’hui l’anarchisme de praxis se lève avec force et demande impérativement la rénovation théorico-pratique et le dépassement des expériences de luttes passées, abandonnant pour toujours la muséographie archéologique, l’immobilisme lâche et l’attitude protagoniste de l’académicien “progressiste” (celui dont se référaient les groupes d’affinité dans un de leurs plus récents communiqués), pour récupérer son humeur transgressive, sa conflictualité permanente et sa nature destructrice. En effet, comme me le disaient certain-e-s des compagnon-ne-s qui ont organisé les Journées Informelles Anarchistes/Symposium International, devant ces événements terribles : à l’Âge d’Or de l’anarchisme classique, dans les années épiques de cette dynamique anarchiste qui s’intensifiait comme paradigme subversif indiscutable, les déportations, les emprisonnements et les assassinats de compagnon-ne-s anarchistes étaient monnaie courante. Combien de fois nos compagnon-ne-s d’autrefois n’ont pas été déporté-e-s et emprisonné-e-s ? Combien n’ont pas été assassiné-e-s et/ou exécuté-e-s sur l’échafaud de monarchies rabougries et de républiques modernes ? Qu’aujourd’hui ils déportent, emprisonnent et assassinent nos compagnon-ne-s c’est la preuve irréfutable du réveil anarchiste, la meilleure preuve de vitalité et vigueur de notre théorie et pratique, le signe le plus indiscutable du rayonnement anarchiste.

Désormais nous ne pourrons plus faire abstraction de la praxis anarchiste. Aujourd’hui la réflexion théorique et la pratique commencent à se situer dans le contexte historique qui lui est propre, conférant une plus grande prédominance aux compagnon-ne-s récemment intégré-e-s dans la lutte acrate qui insistent sur la communion nécessaire entre idées et action, dans l’urgence inévitable d’entraîner notre théorie dans la pratique et de ranimer notre champs théorique à partir de la pratique.

Malheureusement, le compagnon Alfredo Bonanno ne nous accompagnera pas physiquement dans cet effort gigantesque de rénovation théorico-pratique. Nos ennemis ne pouvaient pas se donner le luxe de permettre une aventure fondatrice transgénérationnelle d’une telle ampleur et c’est pour cela qu’ils ont une fois de plus eu recours à la proscription et aux exclusions. Cependant cette panoplie immense de vibrations communes qui rendent possible la réalisation de ces Journées Informelles est la reconstruction indiscutable de cette épopée transgénérationnelle qui aujourd’hui se concrétise à travers l’anarchisme de praxis. C’est pour cela que, malgré les proscriptions et interdictions, tous les absents seront à nos côtés, face à face avec l’ennemi. Malgré les épreuves nous aurons avec nous notre cher Bonanno, notre frère Gabriel Pombo Da Silva ; la chère Felicity Ann Ryder ; Mario González ; Stefano Gabriel Fosco, Elisa Di Bernardo, nos semblable Panagiotis Argyrou , Mihalis Nikolopoulos , Giorgos Nikolopoulos , Gerasimos Tsakalos , Hristos Tsakalos, Giorgos Polydoros, Damianos Bolano, Haris Hadzimihelakis, Olga Ikonomidou, Alfredo Cospito et Nicola Gai ; Hans Niemeyer ; Marcelo Villaroel ; Freddy Fuentevilla ; Juan Aliste Vega ; Carlos Gutierrez Quiduleo ; Mónica Caballero Sepúlveda ; Francisco Solar ; Víctor Montoya ; José Miguel Sánchez ; Hermes González ; Alfonso Alvia et tant d’autres frères et sœurs prisonnier-e-s, en restriction domiciliaire ou en cavale.

Et nous aurons aussi à nos côtés les inoubliables : Sergio “Urubú” Terenzi, Claudia López Benaige, Jhonny Cariqueo, Lambros Foundas, Xosé Tarrío González, el Punky Maury Morales, mon cher Rafael Spósito, Matías Catrileo Quezada, Sebastián Oversluij Seguel et tant d’autres compagnon-ne-s irremplaçables qui sont parti-e-s mais continuent de nous montrer le chemin.

Vive l’anarchie, et que le battement de son cœur rénové s’entende dans tous les confins de la Planète !

Gustavo Rodríguez
Mexique, 24 décembre 2013

P.S. informatif : pour le moment nous avons reçu un premier coup. Comme certains compas le savent déjà nous attendions l’arrivée d’Alfredo à 21h30 et il n’est jamais sorti par la porte d’arrivée. Nous avons demandé au service de Migration et ils nous ont dit que si c’était pour “raison d’interrogation” il pouvait resté de 3 à 5h retenu et si après ce laps de temps il ne sortait pas c’est qu’on lui avait refusé l’entrée dans le pays. Six heures plus tard, désespérés et préoccupés, nous avons redemandé et ils nous ont informé qu’il n’étaient pas autorisé à informer lorsqu’il y a des personnes arrêtées ou expulsées, ni sur les motifs de cette décision. Cependant quelque temps après ils nous ont informé qu’il avait pu être transféré dans les cellules du Terminal I pour être déporté une fois la destination convenue. Je suis allé immédiatement là-bas mais je n’ai pu obtenir aucune information, et nous en avons déduit qu’il avait été déporté. Ce qui est bizarre est qu’il ne m’a pas appelé et qu’il avait son portable éteint, ce qui m’a laissé pensé qu’il pouvait encore se trouver détenu au Mexique.

Et bon, après ce mauvais moment passé, il nous reste l’agréable sensation lorsqu’après trois longues heures d’interrogation, ils ont laissé entrer Constantino Cavalleri et la légendaire Jean Weir, qui ont partagé avec nous leurs réflexions et expériences dans les Journées Informelles. Curieusement, au cours du “profond” interrogatoire que les agents du gouvernement leur ont fait subir, ils ont demandé à chacun s’ils étaient anarchistes, et à la réponse positive ils ont cherché à savoir de quel “type d’anarchisme”. Devant des questions aussi absurdes autant Jean que Costa ont exigé qu’ils soient plus précis, ce à quoi les enquêteurs ont répondu “qu’il y a un anarchisme bon et un anarchisme mauvais”, élucubrations qui complétaient la question suivante : Quels sont vos héros ou personnages légendaires ? Et ils terminaient par la question à un million de dollars : vous venez au Symposium anarchiste ou à l’Escuelita Zapatiste ? Sans aucun doute la réponse de cette dernière question permettait à ces agents de cocher dans la bonne case sans se tromper.

[Traduit de l’espagnol par Camotazo de Viva la Anarquia, 25 diciembre, 2013]


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