[Rennes] Le front dans le caniveau…

Tract distribué par quelques compagnon-e-s lors de la manifestation antifasciste du 25 janvier à rennes

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Le front dans le caniveau…

« On vit une bien sombre époque », triste tragédie que les larves démocrates voudraient nous faire jouer. Ils voudraient qu’on s’indigne sur ce pitoyable ersatz des années 30 qu’ils essayent de nous vendre en guise de conscience. Certes le FN est à 20%, et la fille du pirate borgne s’apprette à partir à l’abordage de nombreuses villes, sur un vaisseau maquillé comme une voiture volée aux couleurs de la république. Dans cette tourmente en carton, il reste bien l’ouverture d’un local à Rennes pour émouvoir le public.

Mais s’en indigner aux cotés de la canaille républicaine et des gauchistes, ce serait pour nous anarchistes oublier que le péril fasciste qu’ils dénoncent pieusement ; ils en gèrent les éléments dans l’ordre qu’ils nous imposent. Un gouvernement « socialiste » qui rase les camps de roms, expulse les sans papiers et traque les pauvres dans les rues avec le même soin méticuleux que la droite raciste et décomplexée quelques années auparavant, une touche d’humanitaire exhibée honteusement en plus en guise de cache sexe.

On oublie pas d’où vient le FN et ses idées nauséabondes, mais on n’oublie pas non plus que pendant près d’un siècle ces beau esprits de gauche comme de droite défendaient becs et ongles l’ordre colonial, auquel beaucoup de leur cadres ont participé en tant que fonctionnaires.

À droite ce sont les héritiers du SAC et L’OAS qui, sous couvert d’ouverture, ont croisé leur frères parias dans les cercles du club de l’horloge et du GRECE et aujourd’hui ils parlent la même langue nauséabonde et crèvent de la même gangrène mentale.

À gauche c’est un concert de discours tout aussi puants, où on invoque l’état et la régulation contre le libéralisme sauvage, et où les outils sécuritaires sous couverts d’égalité doivent écraser tout le monde sous le même poids. On n’oublie pas les reniements des prétendus socialistes face au capitalisme triomphant, les bulldozers contre les foyers d’immigrés dans la banlieue parisienne des années 80 envoyés par les mairies communistes, l’expulsion des sans papiers occupants de la bourse du travail, il y a quelques années par la CGT. Ou la manière dont la municipalité verte de Montreuil envoie depuis plusieurs années des gros bras sans aucune autre forme de procès pour expulser les squats.

C’est pour ça qu’on est contre tous les fronts, nationaux ou populaires, de gauche comme de droite.

Parce que la lutte antifasciste a toujours été le prétexte aux pires compromis avec le pouvoir. La défense du cloaque démocratique face au péril fasciste, tout cela aux cotés des kapos du capital qui nous enverront leurs chiens dès qu’on attaquera le monde qu’ils nous imposent.

Parce qu’il s’agit toujours de canaliser la masse du troupeau. Alors qu’en réalité la masse a toujours été l’ennemi de l’individu. Ses désirs s’y trouvent noyés dans « l’intérêt général » derrière lequel avance masquée la raison du pouvoir.

Ne soyons plus dupe des oppositions de façade et des conflits de partis pour la gouvernance d’une société hiérarchisée qui nous écrase tous. En tant qu’individualités sensibles et raisonnables notre place est dans la lutte contre l’autorité sous toutes ses formes pas dans la défense de l’ordre existant même sous couvert de péril fasciste.

On préfère lutter avec nos armes plutôt que de chier dans les urnes, et de se planquer derrière des leaders politiques ou syndicaux. De toute manière c’est toute la vie qu’il s’agit de libérer du poids des vielles structures sociales et des hiérarchies obsolètes, et pas simplement de prendre un palais ou un hémicycle.

Car c’est chacun de nous dans nos quotidiens qui contribuons à reproduire les rapports et les structures de la domination, c’est à chacun de nous de se révolter et d’attaquer ces rapports-là où nous nous trouvons et sans attendre, avec nos propres armes. De concevoir et d’expérimenter d’autres rapports sociaux basés sur le respect de la singularité. De cesser de compter nos gestes et nos respirations, comme on compte ses partisans et les tracts qu’on diffuse mais de concevoir la qualité de nos vies et de nos liens. Et leur développement dans le présent. La liberté ne se mendie pas, elle se conquiert par la lutte.

Ni dictature ni démocratie, vive l’anarchie

attaquons sans répit l’autorité partout où elle se trouve

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[Publié sur Indymedia Nantes le 27 janvier 2014]

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